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Poemas en Francés es un blog que pretende acercar poemas de lengua francesa al castellano |
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"Por principio, toda traducción es buena. En cualquier caso, pasa con ellas lo que con las mujeres: de alguna manera son necesarias, aunque no todas son perfectas" Augusto Monterroso -La palabra mágica-
"Es imposible traducir la poesía. ¿Acaso se puede traducir la música?" Voltaire
"La traducción destroza el espíritu del idioma" Federico García Lorca |
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Louise Labé -Tout aussitôt que je commence à prendre...- |
dimanche, mai 29, 2005 |
Tout aussitôt que je commence à prendre... Louise Labé (1524-1566)
Tout aussitôt que je commence à prendre Dans le mol lit le repos désiré, Mon triste esprit hors de moi retiré, S'en va vers toi incontinent se rendre.
Lors m'est avis que dedans mon sein tendre Je tiens le bien, où j'ai tant aspiré, Et pour lequel j'ai si haut soupiré Que de sanglots ai souvent cuidé fendre.
Ô doux sommeil, ô nuit à moi heureuse ! Plaisant repos, plein de tranquillité, Continuez toutes les nuits mon songe :
Et si jamais ma pauvre amoureuse Ne doit avoir de bien en vérité, Faites au moins qu'elle en ait en mensonge.
En el instante en que me entrego...
En el instante en que me entrego, en el blando lecho, al ansiado reposo, mi triste espíritu me abandona y se dirige a ti.
Y me parece entonces que en mi tierno seno poseo el bien que tanto deseé, y por el que tanto he suspirado que creí muchas veces deshacerme en llanto.
¡Oh dulce sueño, oh noche para mí tan dichosa! apacible descanso placentero, proseguid cada noche mi sueño;
y si nunca mi pobre alma enamorada ha de conocer de veras la dicha, haced que la conozca al menos de mentira.
Versión de Caridad MartínezLibellés : Louise Labé |
posted by Alfil @ 12:28 PM |
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Louise Labé -Ô beaus yeus bruns...- |
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Ô beaus yeus bruns... Louise Labé (1525-1566)
Ô beaus yeus bruns, ô regars destournez, Ô chaus soupirs, ô larmes espandues, Ô noires nuits vainement atendues, Ô jours luisans vainement retournez: Ô tristes pleins, ô désirs obstinez, Ô tems perdu, ô peines despendues, Ô mile morts en mile rets tendues, Ô pires maus contre moi destinez. Ô ris, ô front, cheveus, bras, mains et doits: Ô lut pleintif, viole, archet et vois: Tant de flambeaus pour ardre une femmelle! De toy me plein, que tant de feus portant, Et tant d'endrois d'iceus mon coeur tatant, N'en est sur toy volé quelque estincelle.
Oh bellos ojos negros...
¡Oh bellos ojos negros, oh mirar distanciado, Oh cálidos suspiros, oh lágrimas vertidas, Oh las oscuras noches vanamente atendidas, Oh los días claros vanamente retornados! ¡Oh dolientes quejas, oh deseos obstinados, Oh tiempo malgastado, oh penas prodigadas, Oh mil muertes en mil celadas desplegadas, Oh peores males en mi contra destinados! ¡Oh brazos, manos, dedos, cabello, risa, frente, Oh voz, oh viola y arco, oh laúd doliente!: ¡Cuántas llamas para hacer arder a una mujer! De ti me quejo, que tanto fuego poseyendo, En tantos lados mi corazón fuiste encendiendo, Sin que un solo destello pudiera en ti caer.
Versión de Sonia Mabel YebaraLibellés : Louise Labé |
posted by Alfil @ 11:43 AM |
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Louise Labé -Baise m'encore...- |
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Baise m´encore... Louise Labé (1525-1566)
Baise m´encore, rebaise moi et baise: Donne m´en un de tes plus savoureux, Donne m´en un de tes plus amoureux: Je t´en rendrai quatre plus chauds que braise.
Las, te plains-tu? Ça que ce mal j´apaise En t´en donnant dix autres doucereux, Ainsi mêlant nos baisers tant heureux Jouissons-nous l´un de l´autre à notre aise.
Lors double vie à chacun en suivra, Chacun en soi et son ami vivra. Permets m´amour penser quelque folie:
Toujours suis mal, vivant discrètement, Et ne me puis donner contentement Si, hors de moi, ne fais quelque saillie.
Bésame otra vez...
Bésame otra vez y vuélveme a besar: Dame uno de tus besos más sabrosos, Dame uno de tus besos amorosos, Cual brasa ardiente cuatro te voy a dar.
¿Te quejas? Ven, que yo calme tu pesar, Dándote, aún, diez besos deleitosos. Y mezclando nuestros besos tan dichosos, Del placer entrambos vamos a gozar.
Cada uno así doble vida tendrá, Porque en sí y en su amigo vivirá. Amor, déjame una locura sentir:
Siempre estoy mal replegada así en mi vida, Y no consigo sentirme complacida, Si fuera de mí no puedo yo salir.
Versión de Sonia Mabel YebaraLibellés : Louise Labé |
posted by Alfil @ 11:34 AM |
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Jules Laforgue -Sanglot perdu- |
vendredi, mai 27, 2005 |
Sanglot perdu Jules Laforgue (1860-1887)
Les étoiles d'or rêvaient éternelles; Seul, sous leurs regards, songeant, loin de tous, Devant leur douceur tombant à genoux, Moi je sanglotais longuement vers elles.
« Ah! pourquoi, parlez, étoiles cruelles ! La Terre et son sort? Nous sommes jaloux! N'a-t-elle pas droit aussi bien que vous À sa part d'amour des lois maternelles ?
« Quelqu'un veille-t-il, aux nuits solennelles ? Qu'on parle! Est-ce oubli, hasard ou courroux? Pourquoi notre sort? C'est à rendre fous! »... - Les étoiles d'or rêvaient éternelles...
Sollozo perdido
Las estrellas de oro soñaban eternas; Solo, ante sus ojos, pensando, alejado, Ante su dulzura yo me arrodillaba: Iba lentamente mi llanto hacia ellas.
«¡Hablad, ah! ¿Por qué, estrellas crueles? ;La Tierra y su suerte? ¡Estamos celosos! ¿Ella no reclama, igual que vosotras, su parte de amor de leyes maternas?
»¿Hay alguien despierto, las noches solemnes? ¡Que hable! ¿Es olvido, es ira o azar? ¿Por qué nuestra suerte? ¡Es una locura!»... —Las estrellas de oro soñaban eternas...
Versión de Margarita Gómez SierraLibellés : Jules Laforgue |
posted by Alfil @ 6:52 AM |
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Jules Laforgue -Éclair de gouffre- |
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Éclair de gouffre Jules Laforgue (1860-1887)
J'étais sur une tour au milieu des étoiles !
Soudain, coup de vertige. Un éclair où, sans voiles, Je sondais grelottant d'effarement, de peur, L'énigme du Cosmos dans toute sa stupeur ! Tout est-il seul ? Où suis-je ? Où va ce bloc qui roule Et m'emporte ? - Et je puis mourir ! mourir, partir, Sans rien savoir ! Parlez ! Ô rage, et le temps coule Sans retour ! Arrêtez ! arrêtez ! et jouir ? Car j'ignore tout, moi ! Mon heure est là peut-être: Je ne sais pas ! J'étais dans la nuit, puis je nais. Pourquoi ? D'où l'univers ? Où va-t-il ? Car le prêtre N'est qu'un homme. On ne sait rien ! Montre-toi, parais, Dieu, témoin éternel ! Parle, pourquoi la vie ? Tout se tait ! Oh ! l'espace est sans cœur ! Un moment ! Astres ! Je ne veux pas mourir ! J'ai du génie ! Ah ! redevenir rien irrévocablement !
Relámpago de abismo
Me hallaba en una torre en medio de los astros.
Un vértigo, de pronto. ¡En un rayo, sin velos, Escrutaba, temblando de pánico, de espanto, El enigma del Cosmos en todo su estupor! ¿Todo está solo? ¿Dónde estoy? ¿A dónde rueda El bloque que me arrastra? ¡Puedo morir, partir, Sin saber nada! ¡Hablad! ¡Oh rabia, el tiempo vuela Sin vuelta atrás! ¡Parad, parad! ¿Y disfrutar? ¡Pues que todo lo ignoro! Llegó mi hora tal vez: No sé. Yo me encontraba en la noche, y nací. ¿Por qué? ¿Y el universo? ¿A dónde -va? Que el cura Es sólo un hombre. Nada sabemos. ¡Dios, asómate, Testigo eterno, muéstrate! Habla, ¿por qué la vida? Todo calla. El espacio no tiene alma. ¡Esperad! ¡No quiero morir, astros! ¡Soy una inteligencia! ¡Ah, volver a ser nada irremediablemente!
Versión de Margarita Gómez SierraLibellés : Jules Laforgue |
posted by Alfil @ 6:46 AM |
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Alphonse de Lamartine -Le vallon- |
mercredi, mai 25, 2005 |
Le vallon Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Mon coeur, lassé de tout, même de l'espérance, N'ira plus de ses voeux importuner le sort ; Prêtez-moi seulement, vallon de mon enfance, Un asile d'un jour pour attendre la mort.
Voici l'étroit sentier de l'obscure vallée : Du flanc de ces coteaux pendent des bois épais, Qui, courbant sur mon front leur ombre entremêlée, Me couvrent tout entier de silence et de paix.
Là, deux ruisseaux cachés sous des ponts de verdure Tracent en serpentant les contours du vallon ; Ils mêlent un moment leur onde et leur murmure, Et non loin de leur source ils se perdent sans nom.
La source de mes jours comme eux s'est écoulée ; Elle a passé sans bruit, sans nom et sans retour : Mais leur onde est limpide, et mon âme troublée N'aura pas réfléchi les clartés d'un beau jour.
La fraîcheur de leurs lits, l'ombre qui les couronne, M'enchaînent tout le jour sur les bords des ruisseaux, Comme un enfant bercé par un chant monotone, Mon âme s'assoupit au murmure des eaux.
Ah ! c'est là qu'entouré d'un rempart de verdure, D'un horizon borné qui suffit à mes yeux, J'aime à fixer mes pas, et, seul dans la nature, A n'entendre que l'onde, à ne voir que les cieux.
J'ai trop vu, trop senti, trop aimé dans ma vie ; Je viens chercher vivant le calme du Léthé. Beaux lieux, soyez pour moi ces bords où l'on oublie : L'oubli seul désormais est ma félicité.
Mon coeur est en repos, mon âme est en silence ; Le bruit lointain du monde expire en arrivant, Comme un son éloigné qu'affaiblit la distance, A l'oreille incertaine apporté par le vent.
D'ici je vois la vie, à travers un nuage, S'évanouir pour moi dans l'ombre du passé ; L'amour seul est resté, comme une grande image Survit seule au réveil dans un songe effacé.
Repose-toi, mon âme, en ce dernier asile, Ainsi qu'un voyageur qui, le coeur plein d'espoir, S'assied, avant d'entrer, aux portes de la ville, Et respire un moment l'air embaumé du soir.
Comme lui, de nos pieds secouons la poussière ; L'homme par ce chemin ne repasse jamais ; Comme lui, respirons au bout de la carrière Ce calme avant-coureur de l'éternelle paix.
Tes jours, sombres et courts comme les jours d'automne, Déclinent comme l'ombre au penchant des coteaux ; L'amitié te trahit, la pitié t'abandonne, Et seule, tu descends le sentier des tombeaux.
Mais la nature est là qui t'invite et qui t'aime ; Plonge-toi dans son sein qu'elle t'ouvre toujours Quand tout change pour toi, la nature est la même, Et le même soleil se lève sur tes jours.
De lumière et d'ombrage elle t'entoure encore : Détache ton amour des faux biens que tu perds ; Adore ici l'écho qu'adorait Pythagore, Prête avec lui l'oreille aux célestes concerts.
Suis le jour dans le ciel, suis l'ombre sur la terre ; Dans les plaines de l'air vole avec l'aquilon ; Avec le doux rayon de l'astre du mystère Glisse à travers les bois dans l'ombre du vallon.
Dieu, pour le concevoir, a fait l'intelligence : Sous la nature enfin découvre son auteur ! Une voix à l'esprit parle dans son silence : Qui n'a pas entendu cette voix dans son coeur ?
El valle
Hasta de la esperanza ahora se siente hastiado mi corazón, no quiere pedir nada al destino; oh, tú, préstame sólo, valle de mi niñez, el asilo de un día para esperar la muerte.
Ésta es la senda estrecha de mi valle sombrío: llenan ambas laderas unos bosques espesos que cruzando sus sombras curvas sobre mi frente por entero me cubren de silencio y de paz.
Dos arroyos ocultos bajo puentes verdosos serpenteando dibujan los contornos del valle; un instante confunden su murmullo y sus aguas, y no lejos de aquí ya se pierden sin nombre.
Se han perdido también de mi vida las aguas, que se fueron sin ruido, sin retorno y sin nombre; mas la fuente es muy límpida, y mi alma enturbiada no ha podido espejear luz de días hermosos.
El frescor de sus cauces y su manto de sombra me encadenan por siempre cerca de estos arroyos: como un niño mecido por un canto monótono se adormece mi espíritu al murmullo del agua.
Allí estoy entre muros de verdor, con un corto horizonte ante mí que ya basta a mis ojos, sin moverme y tan solo con la naturaleza, sin oír más que el agua, sólo viendo los cielos.
Demasiado en mi vida he sentido y amado; aunque vivo, ahora busco del Leteo la calma. ¡Oh lugares tan bellos, dad también el olvido! Desde ahora el olvido ya es mi única dicha.
Corazón aquietado como el alma en silencio; oigo apenas el ruido muy lejano del mundo como un eco remoto que se ahogó en la distancia y que traen los vientos al oído inseguro.
La existencia la veo como en medio de brumas deshacerse en la sombra del pasado perdido. Sólo queda el amor, como queda una imagen que perdura en el alba cuando un sueño se borra.
Alma mía, reposa en este último asilo como lo hace un viajero que camina con fe, que se sienta a las puertas de la nueva ciudad y respira un instante el perfume del véspero.
Sacudamos como él de los pies todo el polvo; nunca más volveremos a andar este camino; respiremos como él al final de la senda esta calma que anuncia una paz que no acaba.
Tan oscuros y breves como días de otoño son tus días que menguan como sombras del monte. La amistad te traiciona, la piedad te abandona, solitaria desciendes donde están los sepulcros.
Mas aquí está invitándote la natura que te ama; piérdete en sus entrañas que ella siempre te ofrece: aunque todo es mudanza, la natura es la misma, como el sol es el mismo que da luz a tus días.
Ella sigue envolviéndote con sus luces y sombras, sé insensible a los falsos bienes que ya has perdido, ven y adora aquí el eco que adoraba Pitágoras, presta oído con él al celeste concierto.
Con la luz sé tú el cielo, sé la sombra en la tierra; en los llanos del aire sé aquilón volador; con los pálidos rayos misteriosos de luna sé cual alma del bosque en la sombra del valle.
Dios nos dio inteligencia para así concebirlo: la natura descubre en sí misma a su autor. Una voz en silencio al espíritu ha hablado: ¿Quién no ha oído esta voz resonar en su pecho?Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 5:13 AM |
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Alphonse de Lamartine -Le lac- |
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Le lac Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages, Dans la nuit éternelle emportés sans retour, Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges Jeter l'ancre un seul jour ?
O lac! l'année à peine a fini sa carrière, Et près des flots chéris qu'elle devait revoir, Regarde! je viens seul m'asseoir sur cette pierre Où tu la vis s'asseoir!
Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes ; Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés ; Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes Sur ses pieds adorés.
Un soir, t'en souvient- il ? nous voguions en silence, On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux, Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence Tes flots harmonieux.
Tout à coup des accents inconnus à la terre Du rivage charmé frappèrent les échos ; Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère Laissa tomber ces mots :
" O temps, suspends ton vol ! et vous, heures propices Suspendez votre cours ! Laissez-nous savourer les rapides délices Des plus beaux de nos jours !
" Assez de malheureux ici-bas vous implorent : Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ; Oubliez les heureux.
" Mais je demande en vain quelques moments encor Le temps m'échappe et fuit ; Je dis à cette nuit : " Sois plus lente "; et l'aurore Va dissiper la nuit.
" Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive, Hâtons-nous, jouissons ! L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive Il coule, et nous passons ! "
Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse., Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur, S'envolent loin de nous de la même vitesse Que les jours de malheur ?
Hé quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ? Quoi ? passés pour jamais ? quoi! tout entiers perdus ? Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface, Ne nous les rendra plus ?
Éternité, néant, passé, sombres abîmes, Que faites-vous des jours que vous engloutissez ? Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes Que vous nous ravissez?
O lac! rochers muets ! grottes! forêt obscure ! Vous que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir, Gardez de cette nuit, gardez, belle nature, Au moins le souvenir !
Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages, Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux, Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages Qui pendent sur tes eaux !
Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe, Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés, Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface De ses molles clartés!
Que le vent qui gémit le roseau qui soupire Que les parfums légers de ton air embaumé, Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
Tout dise : " Ils ont aimé ! "
El lago
Así siempre empujados hacia nuevas orillas, en la noche sin fin que no tiene retorno, ¿no podremos jamás en el mar de los tiempos echar ancla algún día?
Lago, apenas el año ya concluye su curso y muy cerca del agua donde yo le di cita, mira, vengo a sentarme solo sobre esta piedra donde ayer se sentaba.
Tú bramabas así bajo estas mismas rocas, te rompías con furia en su herido costado; así el viento arrojaba tus oleajes de espuma a sus pies adorados.
Una tarde, ¿te acuerdas?, en silencio bogába entre el agua y los cielos a lo lejos se oía solamente el rumor de los remos golpeando tu armonioso cristal.
De repente una música que ignoraba la tierra despertó de la orilla encantada los ecos; prestó oídos el agua y la voz tan amada pronunció estas palabras:
«Tiempo, no vueles más. Que las horas propicias interrumpan su curso. ¡Oh, dejadnos gozar de las breves delicias de este día tan bello!
Todos los desdichados aquí abajo os imploran: sed para ellos muy raudas. Con los días quitadles el mal que les consume; olvidad al feliz.
Mas en vano yo pido unos instantes más, ya que el tiempo me huye. A esta noche repito: "Sé más lenta", y la aurora ya disipa la noche.
¡Oh, sí, amémonos, pues, y gocemos del tiempo fugitivo, de prisa! Para el hombre no hay puerto, no hay orillas del tiempo, fluye mientras pasamos.»
Tiempo adusto, ¿es posible que estas horas divinas en que amor nos ofrece sin medida la dicha de nosotros se alejen con la misma presteza que los días de llanto?
¿No podremos jamás conservar ni su huella? ¿Para siempre pasados? ¿Por completo perdidos? Lo que el tiempo nos dio, lo que el tiempo ha borrado, ¿no lo va a devolver?Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 5:00 AM |
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Alphonse de Lamartine -L'automne- |
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L'automne Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure ! Feuillages jaunissants sur les gazons épars ! Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature Convient à la douleur et plaît à mes regards !
Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire, J'aime à revoir encor, pour la dernière fois, Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !
Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire, A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits, C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !
Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie, Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui, Je me retourne encore, et d'un regard d'envie Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui !
Terre, soleil, vallons, belle et douce nature, Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ; L'air est si parfumé ! la lumière est si pure ! Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !
Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie Ce calice mêlé de nectar et de fiel ! Au fond de cette coupe où je buvais la vie, Peut-être restait-il une goutte de miel ?
Peut-être l'avenir me gardait-il encore Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ? Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...
La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ; A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ; Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire, S'exhale comme un son triste et mélodieux.
El otoño
¡Salve, bosques que ciñen los verdores postreros! Amarillos follajes en la hierba esparcidos; ¡salve, breve hermosura! La natura enlutada se acomoda al dolor y me es grata a los ojos.
Ando a pasos muy lentos el desierto camino y por última vez vuelvo a ver este sol palidísimo y bello cuya luz expirante ilumina a mis pies la tiniebla del bosque.
Para mí hay más encanto en la luz del otoño cuando todo se muere a su vista empañada: el adiós de un amigo, la sonrisa postrera de unos labios a punto de sellarse por siempre.
Ya dispuesto a dejar la ilusión de la vida, y llorando los sueños esfumados que tuve, vuelvo aún la cabeza y envidioso contemplo esos grandes tesoros de que nunca gocé.
Tierra y sol, valles, bella, mansa naturaleza, os debía una lágrima con un pie en el sepulcro. ¡Todo el aire es perfume y la luz es tan pura! ¡Al que muere este sol le parece tan bello!
Yo quisiera apurar hasta las mismas heces este cáliz que mezcla con el néctar la hiel; tal vez en esta copa donde bebí la vida pueda haber todavía una gota de miel.
El futuro quizá para mí reservaba un retorno a la dicha de la cual nada espero. Es posible que un alma que yo ignoro aún hubiese comprendido mi alma, respondiendo a mis ansias...
La flor muere entregando sus perfumes al céfiro; a la vida y al sol, éstos son mis adioses; ahora muero y mi alma cuando expiro se exhala como un triste sonido lleno de melodía.Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 4:50 AM |
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Alphonse de Lamartine -Pensée des morts- |
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Pensée des morts Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Voilà les feuilles sans sève Qui tombent sur le gazon, Voilà le vent qui s'élève Et gémit dans le vallon, Voilà l'errante hirondelle. Qui rase du bout de l'aile: L'eau dormante des marais, Voilà l'enfant des chaumières Qui glane sur les bruyères Le bois tombé des forêts.
L'onde n'a plus le murmure, Dont elle enchantait les bois ; Sous des rameaux sans verdure. Les oiseaux n'ont plus de voix ; Le soir est près de l'aurore, L'astre à peine vient d'éclore Qu'il va terminer son tour, Il jette par intervalle Une heure de clarté pâle Qu'on appelle encore un jour.
L'aube n'a plus de zéphire Sous ses nuages dorés, La pourpre du soir expire Sur les flots décolorés. La mer solitaire et vide N'est plus qu'un désert aride Où l'oeil cherche en vain l'esquif, Et sur la grève plus sourde La vague orageuse et lourde N'a qu'un murmure plaintif.
La brebis sur les collines Ne trouve plus le gazon, Son agneau laisse aux épines Les débris de sa toison, La flûte aux accords champêtres Ne réjouit plus les hêtres Des airs de joie ou d'amour, Toute herbe aux champs est glanée: Ainsi finit une année, Ainsi finissent nos jours!
C'est la saison où tout tombe Aux coups redoublés des vents; Un vent qui vient de la tombe Moissonne aussi les vivants: Ils tombent alors par mille, Comme la plume inutile Que l'aigle abandonne aux airs, Lorsque des plumes nouvelles Viennent réchauffer ses ailes À l'approche des hivers.
C'est alors que ma paupière Vous vit pâlir et mourir, Tendres fruits qu'à la lumière Dieu n'a pas laissé mûrir! Quoique jeune sur la terre, Je suis déjà solitaire Parmi ceux de ma saison, Et quand je dis en moi-même: "Où sont ceux que ton coeur aime? Je regarde le gazon."
Leur tombe est sur la colline, Mon pied la sait ; la voilà! Mais leur essence divine, Mais eux, Seigneur, sont-ils là? Jusqu'à l'indien rivage Le ramier porte un message Qu'il rapporte à nos climats ; La voile passe et repasse, Mais de son étroit espace Leur âme ne revient pas.
Ah! quand les vents de l'automne Sifflent dans les rameaux morts, Quand le brin d'herbe frissonne, Quand le pin rend ses accords, Quand la cloche des ténèbres Balance ses glas funèbres, La nuit, à travers les bois, A chaque vent qui s'élève, A chaque flot sur la grève, Je dis: N'es-tu pas leur voix?
Du moins si leur voix si pure Est trop vague pour nos sens, Leur âme en secret murmure De plus intimes accents ; Au fond des coeurs qui sommeillent, Leurs souvenirs qui s'éveillent Se pressent de tous côtés, Comme d'arides feuillages Que rapportent les orages Au tronc qui les a portés!
C'est une mère ravie A ses enfants dispersés, Qui leur tend de l'autre vie Ces bras qui les ont bercés ; Des baisers sont sur sa bouche, Sur ce sein qui fut leur couche Son coeur les rappelle à soi ; Des pleurs voilent son sourire, Et son regard semble dire: Vous aime-t-on comme moi?
C'est une jeune fiancée Qui, le front ceint du bandeau, N'emporta qu'une pensée De sa jeunesse au tombeau ; Triste, hélas! dans le ciel même, Pour revoir celui qu'elle aime Elle revient sur ses pas, Et lui dit: Ma tombe est verte! Sur cette terre déserte Qu'attends-tu? Je n'y suis pas!
C'est un ami de l'enfance, Qu'aux jours sombres du malheur Nous prêta la Providence Pour appuyer notre coeur ; Il n'est plus ; notre âme est veuve, Il nous suit dans notre épreuve Et nous dit avec pitié: Ami, si ton âme est pleine, De ta joie ou de ta peine Qui portera la moitié?
C'est l'ombre pâle d'un père Qui mourut en nous nommant ; C'est une soeur, c'est un frère, Qui nous devance un moment ; Sous notre heureuse demeure, Avec celui qui les pleure, Hélas! ils dormaient hier! Et notre coeur doute encore, Que le ver déjà dévore Cette chair de notre chair !
L'enfant dont la mort cruelle Vient de vider le berceau, Qui tomba de la mamelle Au lit glacé du tombeau ; Tous ceux enfin dont la vie Un jour ou l'autre ravie, Emporte une part de nous, Murmurent sous la poussière: Vous qui voyez la lumière, Vous souvenez-vous de nous?
Ah! vous pleurer est le bonheur suprême Mânes chéris de quiconque a des pleurs! Vous oublier c'est s'oublier soi-même: N'êtes-vous pas un débris de nos coeurs?
En avançant dans notre obscur voyage, Du doux passé l'horizon est plus beau, En deux moitiés notre âme se partage, Et la meilleure appartient au tombeau!
Dieu du pardon! leur Dieu! Dieu de leurs pères! Toi que leur bouche a si souvent nommé! Entends pour eux les larmes de leurs frères! Prions pour eux, nous qu'ils ont tant aimé!
Ils t'ont prié pendant leur courte vie, Ils ont souri quand tu les as frappés! Ils ont crié: Que ta main soit bénie! Dieu, tout espoir! les aurais-tu trompés?
Et cependant pourquoi ce long silence? Nous auraient-ils oubliés sans retour? N'aiment-ils plus? Ah! ce doute t'offense! Et toi, mon Dieu, n'es-tu pas tout amour?
Mais, s'ils parlaient à l'ami qui les pleure, S'ils nous disaient comment ils sont heureux, De tes desseins nous devancerions l'heure, Avant ton jour nous volerions vers eux.
Où vivent-ils? Quel astre, à leur paupière Répand un jour plus durable et plus doux? Vont-ils peupler ces îles de lumière? Ou planent-ils entre le ciel et nous?
Sont-ils noyés dans l'éternelle flamme? Ont-ils perdu ces doux noms d'ici-bas, Ces noms de soeur et d'amante et de femme? A ces appels ne répondront-ils pas?
Non, non, mon Dieu, si la céleste gloire Leur eût ravi tout souvenir humain, Tu nous aurais enlevé leur mémoire ; Nos pleurs sur eux couleraient-ils en vain?
Ah! dans ton sein que leur âme se noie! Mais garde-nous nos places dans leur cour ; Eux qui jadis ont goûté notre joie, Pouvons-nous être heureux sans leur bonheur?
Etends sur eux la main de ta clémence, Ils ont péché; mais le ciel est un don! Ils ont souffert; c'est une autre innocence! Ils ont aimé; c'est le sceau du pardon!
Ils furent ce que nous sommes, Poussière, jouet du vent! Fragiles comme des hommes, Faibles comme le néant! Si leurs pieds souvent glissèrent, Si leurs lèvres transgressèrent Quelque lettre de ta loi, Ô Père! ô juge suprême! Ah! ne les vois pas eux-mêmes, Ne regarde en eux que toi!
Si tu scrutes la poussière, Elle s'enfuit à ta voix! Si tu touches la lumière, Elle ternira tes doigts! Si ton oeil divin les sonde, Les colonnes de ce monde Et des cieux chancelleront: Si tu dis à l'innocence: Monte et plaide en ma présence! Tes vertus se voileront.
Mais toi, Seigneur, tu possèdes Ta propre immortalité ! Tout le bonheur que tu cèdes Accroît ta félicité! Tu dis au soleil d'éclore, Et le jour ruisselle encore! Tu dis au temps d'enfanter, Et l'éternité docile, Jetant les siècles par mille, Les répand sans les compter!
Les mondes que tu répares Devant toi vont rajeunir, Et jamais tu ne sépares Le passé de l'avenir ; Tu vis! et tu vis! les âges, Inégaux pour tes ouvrages, Sont tous égaux sous ta main ; Et jamais ta voix ne nomme, Hélas! ces trois mots de l'homme: Hier, aujourd'hui, demain!
Ô Père de la nature, Source, abîme de tout bien, Rien à toi ne se mesure, Ah! ne te mesure à rien! Mets, à divine clémence, Mets ton poids dans la balance, Si tu pèses le néant! Triomphe, à vertu suprême! En te contemplant toi-même, Triomphe en nous pardonnant!
Meditación sobre los muertos
Ved las hojas que ya no tienen savia y que caen encima de la hierba; ved el viento que se alza con su voz gemebunda, que suena por el valle; ved también la viajera golondrina que roza con las puntas de sus alas el agua adormecida del pantano; ved al niño que vive en una choza y que va a recoger entre los brezos esas ramas caídas de los bosques.
Ya no se oye el murmullo de las aguas que encantaba a las fuertes arboledas; bajo ramas que no tienen verdor han perdido los pájaros su voz; el crepúsculo está cerca del alba; apenas nace el sol a nuestros ojos cuando va a terminar su recorrido; antes de su final aún nos depara claridades muy pálidas y breves a las que llamaremos todo un día.
No se siente ya el céfiro en la aurora bajo sus nubes de color dorado; y el rojo del crepúsculo se muere sobre el agua incolora de la tarde. El mar está vacío y solitario, le vemos como un árido desierto en el cual no hay ni sombra de un esquife; y con sordo sonido allí en la playa las olas borrascosas y tardías no son más que un murmullo quejumbroso.
La oveja que recorre las colinas a su paso no encuentra hierba alguna; su cordero ha dejado entre las zarzas las lanosas guedejas que le visten; la flauta de la música campestre ya nunca más alegrará el hayedo con tonadas de júbilo o de amores; han cortado la hierba de los campos: ved cómo acaba un año, ved también cómo acaba en tristeza nuestra vida.
Es ésta la estación que todo troncha por la fuerza impetuosa de los vientos; un aquilón que viene de la tumba siega también a todo ser viviente; se desploman entonces por millares como si fueran esa pluma inútil que el águila abandona mientras vuela cuando otras plumas nuevas han nacido que calientan sus alas otra vez al acercarse el frío del invierno.
En ese tiempo fue cuando mis ojos palidecer os vieron y morir, ¡oh tiernos frutos que no quiso Dios dejar que madurasen a la luz! A pesar de ser joven, en la tierra me he convertido ya en un solitario entre aquellos que son de mi edad misma. Y cuantas veces llego a preguntarme: ¿Dónde están los que ha amado el corazón? la mirada se vuelve hacia la hierba.
En aquella colina está su tumba, bien conocen mis pies este camino; pero, Señor, su esencia que es divina, ellos mismos, Señor, ¿están allí? Hasta las tierras indias tan lejanas una paloma lleva su mensaje, y acaba por volver hasta nosotros. La vela cruza el mar y al fin regresa. Mas del estrecho espacio que ahora ocupan jamás puede volver el alma suya.
Pero, ay, cuando los vientos del otoño silban entre el ramaje ya desnudo, cuando tiemblan las briznas de la hierba, cuando oímos la música del pino, cuando el doblar de la campana oscura» deja oír sus lamentos funerarios, en la noche y en medio de los bosques, a cada viento que levanta el soplo, a cada ola que muere entre los guijos, yo pregunto: ¿No sois su voz acaso?
Al menos, si su voz siendo tan pura es a nuestros sentidos inaudible, sé que su alma en secreto me murmura más íntimos acentos todavía. En unos corazones que dormitan los recuerdos de antaño al despertar se agolpan tumultuosos, en tropel, como unas hojas secas y sin vida que vuelven a traer esas tormentas al tronco que las tuvo entre en sus ramas.
Es una madre que maravillada a sus hijos dispersos para siempre desde la otra ribera de la vida tiende brazos que un día los mecieron; hay besos que florecen en su boca; sobre el pecho que un día fue su cuna su corazón a sí vuelve a llamarlos; hay lágrimas que empañan su sonrisa, y les dice mil veces su mirada: ¿Es que hay alguien que os ame como yo?
O es acaso una joven desposada con corona nupcial sobre la frente que se llevó tan sólo un pensamiento de lo que era ser joven a la tumba. Y que, ay, está triste hasta en el cielo, para volver a ver a aquel que ama, y retorna hacia él para decirle: ¡Mi tumba está cubierta de verdor! En esta tierra que es como un desierto, dime, ¿qué esperas? ¡Yo no estoy contigo!
O es tal vez un amigo de la infancia que en los días oscuros de desdicha nos prestó la benigna Providencia como sostén de nuestro corazón; ya no está aquí, nuestra alma es como viuda; sigue los pasos de tan dura prueba y nos dice movido a compasión: Amigo, si en tu alma ya rebosa el júbilo o acaso la aflicción, ¿quién comparte contigo todo eso?
Es la sombra muy pálida de un padre que murió pronunciando nuestro nombre; o es tal vez una hermana o un hermano que anticipan sus pasos a los nuestros. Bajo el techo de nuestra feliz casa, con aquel que ahora llora por su ausencia, ¡ay, parece que ayer aún dormían! Y el corazón no sabe si creer que el gusano devora en el sepulcro esta carne que es carne también mía.
O el niño cuya muerte tan cruel una cuna vacía deja pronto, y cae de los pechos de su madre a la helada yacija de la tumba. Todos aquellos, pues, cuya existencia se nos arrebató un día u otro, llevándose una parte de nosotros, murmuran desde el polvo que los cubre: ¡Oh vosotros que veis aún la luz! ¿os acordáis tal vez de los ausentes?
Ah, sé bien que lloraros es la dicha suprema, espíritus amados, de quien puede llorar. Si os olvido me olvido de mí mismo también. ¿Es que no sois acaso como un pecio de mi alma?
A medida que andamos en el viaje sombrío es más bello el paisaje del pasado feliz. Y partida por dos se divide nuestra alma, y la parte mejor pertenece al sepulcro.
Dios benigno, su Dios, oh tú, Dios de tus padres, tantas veces nombrado por su boca silente, mira ahora las lágrimas de sus rostros fraternos, ¡oh, recemos por ellos, que nos dieron su amor!
Ellos te suplicaron en su vida tan corta, sonreían también cuando Tú les heriste; exclamaron: Bendita sea siempre tu mano. Oh, Dios, toda esperanza, ¿no les vas a ser fiel?
Y no obstante, ¿por qué este largo silencio? ¿Es que acaso nos han olvidado del todo? ¿Ya no pueden amar? ¡Ah, esa duda te ofende! ¡Oh, Dios mío, Tú que eres todo amor para siempre!
Pero si ellos hablasen al mortal que les llora, si pudieran decirnos lo dichosos que son, viviríamos antes lo que Tú nos preparas, volaríamos antes de tu día hacia ellos.
¿Dónde viven? Di, ¿qué astro ilumina sus ojos con fulgores perennes y más dulces que el sol? ¿Van acaso a poblar esas islas de luz? ¿O se quedan flotando entre el cielo y nosotros?
¿Es que están anegados en el fuego eternal? ¿Han perdido los dulces nombres de nuestra tierra, esos nombres de hermana o de amante o de esposa? ¿Por qué a nuestras llamadas no responden jamás?
No es posible, Dios mío, si la gloria celeste les hubiese borrado los humanos recuerdos, Tú también nos quitaras su memoria en nosotros; ¿es que en vano vertemos nuestro llanto por ellos?
¡Ah, que se pierda su alma en tu seno divino, pero que conservemos en su pecho un lugar! Ya que antaño gozaron de lo que es nuestro júbilo, sin su dicha jamás vamos a ser felices.
¡Oh, sí, extiende sobre ellos esa mano clemente! Es verdad que pecaron, pero el cielo es un don. Y sufrieron también, y ésta es otra inocencia. Y al amar les selló el perdón de los cielos.
Fueron lo mismo que nosotros somos, sólo polvo y juguete de los vientos. Frágiles como siempre son los hombres, débiles como ha de ser la misma nada. Si sus pies a menudo tropezaron, si sus labios pudieron transgredir algún punto concreto de tu ley, ¡Oh Padre, oh Juez supremo, te lo ruego, ah, no veas en ellos cómo son, ve solamente en ellos a ti mismo!
Si remueves el polvo de los cuerpos el polvo será nada ante tu voz. Y si alargas la mano hacia la luz su falsedad te manchará los dedos. Si tus ojos divinos sondearan los hombres, las columnas de este mundo y del cielo verías que retiemblan; si dijeses un día a la inocencia: Sube a la altura a defender tu causa, velarían su rostro tus virtudes.
Pero, Señor, sé bien que Tú posees una inmortalidad que es algo propio. Toda la dicha que Tú das a otro no hace más que aumentar tu propia dicha. Tú dijiste al sol: brilla sobre el mundo y la luz se derrama todavía. Tú dijiste a los tiempos que engendraran, y dócil a tu voz la eternidad hizo siglos y siglos por millares, sin tregua sucediéndose hasta hoy.
Los mundos que Tú quieres restaurar sin fin rejuvenecen ante ti, no separas jamás ante tus ojos el tiempo del pasado y el futuro. Eres la vida, vives, las edades que para tus hechuras son distintas, para ti son iguales, son lo mismo. Y tus labios jamás han pronunciado ay, estas tres palabras tan humanas: que decimos: ayer, hoy y mañana. ¡Oh, Tú, Padre de la naturaleza, abismo y manantial de todo bien, nada puede medirse por ti mismo!
Más, ay, no quieras Tú medirte a nada. ¡Oh, divina clemencia, te suplico que si pesas la nada no te olvides de echar todo tu peso en la balanza! ¡Oh, suprema virtud, triunfa, pues, contemplándote a ti en toda virtud, oh, sí, triunfa al querernos perdonar!Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 4:30 AM |
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Alphonse de Lamartine -Milly ou la Terre natale- |
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Milly ou la Terre natale Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Pourquoi le prononcer ce nom de la patrie? Dans son brillant exil mon cour en a frémi; Il résonne de loin dans mon âme attendrie, Comme les pas connus ou la voix d'un ami.
Montagnes que voilait le brouillard de l'automne, Vallons que tapissait le givre du matin, Saules dont l'émondeur effeuillait la couronne, Vieilles tours que le soir dorait dans le lointain,
Murs noircis par les ans, coteaux, sentier rapide, Fontaine où les pasteurs accroupis tour à tour Attendaient goutte à goutte une eau rare et limpide, Et, leur urne à la main, s'entretenaient du jour,
Chaumière où du foyer étincelait la flamme, Toit que le pèlerin aimait à voir fumer, Objets inanimés, avez-vous donc une âme Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ?
J'ai vu des cieux d'azur, où la nuit est sans voiles, Dorés jusqu'au matin sous les pieds des étoiles, Arrondir sur mon front dans leur arc infini Leur dôme de cristal qu'aucun vent n'a terni ! J'ai vu des monts voilés de citrons et d'olives Réfléchir dans les eaux leurs ombres fugitives, Et dans leurs frais vallons, au souffle du zéphyr, Bercer sur l'épi mûr le cep prêt à mûrir; Sur des bords où les mers ont à peine un murmure, J'ai vu des flots brillants l'onduleuse ceinture Presser et relâcher dans l'azur de ses plis De leurs caps dentelés les contours assouplis, S'étendre dans le golfe en nappes de lumière, Blanchir l'écueil fumant de gerbes de poussière, Porter dans le lointain d'un occident vermeil Des îles qui semblaient le lit d'or du soleil, Ou s'ouvrant devant moi sans rideau, sans limite, Me montrer l'infini que le mystère habite ! J'ai vu ces fiers sommets, pyramides des airs, Où l'été repliait le manteau des hivers, Jusqu'au sein des vallons descendant par étages, Entrecouper leurs flancs de hameaux et d'ombrages, De pics et de rochers ici se hérisser, En pentes de gazon plus loin fuir et glisser, Lancer en arcs fumants, avec un bruit de foudre, Leurs torrents en écume et leurs fleuves en poudre, Sur leurs flancs éclairés, obscurcis tour à tour, Former des vagues d'ombre et des îles de jour, Creuser de frais vallons que la pensée adore, Remonter, redescendre, et remonter encore, Puis des derniers degrés de leurs vastes remparts, À travers les sapins et les chênes épars Dans le miroir des lacs qui dorment sous leur ombre Jeter leurs reflets verts ou leur image sombre, Et sur le tiède azur de ces limpides eaux Faire onduler leur neige et flotter leurs coteaux ! J'ai visité ces bords et ce divin asile Qu'a choisis pour dormir l'ombre du doux Virgile, Ces champs que la Sibylle à ses yeux déroula, Et Cume et l'Élysée; et mon cœur n'est pas là ! ...
Mais il est sur la terre une montagne aride Qui ne porte en ses flancs ni bois ni flot limpide, Dont par l'effort des ans l'humble sommet miné, Et sous son propre poids jour par jour incliné, Dépouillé de son sol fuyant dans les ravines, Garde à peine un buis sec qui montre ses racines, Et se couvre partout de rocs prêts à crouler Que sous son pied léger le chevreau fait rouler. Ces débris par leur chute ont formé d'âge en âge Un coteau qui décroît et, d'étage en étage, Porte, à l'abri des murs dont ils sont étayés, Quelques avares champs de nos sueurs payés, Quelques ceps dont les bras, cherchant en vain l'érable, Serpentent sur la terre ou rampent sur le sable, Quelques buissons de ronce, où l'enfant des hameaux Cueille un fruit oublié qu'il dispute aux oiseaux, Où la maigre brebis des chaumières voisines Broute en laissant sa laine en tribut aux épines; Lieux que ni le doux bruit des eaux pendant l'été, Ni le frémissement du feuillage agité, Ni l'hymne aérien du rossignol qui veille, Ne rappellent au cœur, n'enchantent pour l'oreille; Mais que, sous les rayons d'un ciel toujours d'airain, La cigale assourdit de son cri souterrain. Il est dans ces déserts un toit rustique et sombre Que la montagne seule abrite de son ombre, Et dont les murs, battus par la pluie et les vents, Portent leur âge écrit sous la mousse des ans. Sur le seuil désuni de trois marches de pierre Le hasard a planté les racines d'un lierre Qui, redoublant cent fois ses nœuds entrelacés, Cache l'affront du temps sous ses bras élancés, Et, recourbant en arc sa volute runique, Fait le seul ornement du champêtre portique. Un jardin qui descend au revers d'un coteau Y présente au couchant son sable altéré d'eau; La pierre sans ciment, que l'hiver a noircie, En borne tristement l'enceinte rétrécie; La terre, que la bêche ouvre à chaque saison, Y montre à nu son sein sans ombre et sans gazon; Ni tapis émaillés, ni cintres de verdure, Ni ruisseau sous des bois, ni fraîcheur, ni murmure; Seulement sept tilleuls par le soc oubliés, Protégeant un peu d'herbe étendue à leurs pieds, Y versent dans l'automne une ombre tiède et rare, D'autant plus douce au front sous un ciel plus avare; Arbres dont le sommeil et des songes si beaux Dans mon heureuse enfance habitaient les rameaux ! Dans le champêtre enclos qui soupire après l'onde, Un puits dans le rocher cache son eau profonde, Où le vieillard qui puise, après de longs efforts, Dépose en gémissant son urne sur les bords; Une aire où le fléau sur l'argile étendue Bat à coups cadencés la gerbe répandue, Où la blanche colombe et l'humble passereau Se disputent l'épi qu'oublia le râteau Et sur la terre épars des instruments rustiques, Des jougs rompus, des chars dormant sous les portiques, Des essieux dont l'ornière a brisé les rayons, Et des socs émoussés qu'ont usés les sillons.
Rien n'y console l'œil de sa prison stérile, Ni les dômes dorés d'une superbe ville, Ni le chemin poudreux, ni le fleuve lointain, Ni des toits blanchissants aux clartés du matin; Seulement, répandus de distance en distance, De sauvages abris qu'habite l'indigence, Le long d'étroits sentiers en désordre semés, Montrent leur toit de chaume et leurs murs enfumés, Où le vieillard, assis au seuil de sa demeure, Dans son berceau de jonc endort l'enfant qui pleure; Enfin un sol sans ombre et des cieux sans couleur, Et des vallons sans onde ! - Et c'est là qu'est mon cœur ! Ce sont là les séjours, les sites, les rivages Dont mon âme attendrie évoque les images, Et dont pendant les nuits mes songes les plus beaux Pour enchanter mes yeux composent leurs tableaux !
Là chaque heure du jour, chaque aspect des montagnes, Chaque son qui le soir s'élève des campagnes, Chaque mois qui revient, comme un pas des saisons, Reverdir ou faner les bois ou les gazons, La lune qui décroît ou s'arrondit dans l'ombre, L'étoile qui gravit sur la colline sombre, Les troupeaux des hauts lieux chassés par les frimas, Des coteaux aux vallons descendant pas à pas, Le vent, l'épine en fleurs, l'herbe verte ou flétrie, Le soc dans le sillon, l'onde dans la prairie, Tout m'y parle une langue aux intimes accents Dont les mots, entendus dans l'âme et dans les sens, Sont des bruits, des parfums, des foudres, des orages, Des rochers, des torrents, et ces douces images, Et ces vieux souvenirs dormant au fond de nous, Qu'un site nous conserve et qu'il nous rend plus doux. Là mon cœur en tout lieu se retrouve lui-même ! Tout s'y souvient de moi, tout m'y connaît, tout m'aime ! Mon œil trouve un ami dans tout cet horizon, Chaque arbre a son histoire et chaque pierre un nom. Qu'importe que ce nom, comme Thèbe ou Palmire, Ne nous rappelle pas les fastes d'un empire, Le sang humain versé pour le choix des tyrans, Ou ces fléaux de Dieu que l'homme appelle grands ? Ce site où la pensée a rattaché sa trame, Ces lieux encor tout pleins des fastes de notre âme, Sont aussi grands pour nous que ces champs du destin Où naquit, où tomba quelque empire incertain : Rien n'est vil ! rien n'est grand ! l'âme en est la mesure Un cœur palpite au nom de quelque humble masure, Et sous les monuments des héros et des dieux Le pasteur passe et siffle en détournant les yeux !
Voilà le banc rustique où s'asseyait mon père, La salle où résonnait sa voix mâle et sévère, Quand les pasteurs assis sur leurs socs renversés Lui comptaient les sillons par chaque heure tracés, Ou qu'encor palpitant des scènes de sa gloire, De l'échafaud des rois il nous disait l'histoire, Et, plein du grand combat qu'il avait combattu, En racontant sa vie enseignait la vertu ! Voilà la place vide où ma mère à toute heure Au plus léger soupir sortait de sa demeure, Et, nous faisant porter ou la laine ou le pain, Vêtissait l'indigence ou nourrissait la faim; Voilà les toits de chaume où sa main attentive Versait sur la blessure ou le miel ou l'olive, Ouvrait près du chevet des vieillards expirants Ce livre où l'espérance est permise aux mourants, Recueillait leurs soupirs sur leur bouche oppressée, Faisait tourner vers Dieu leur dernière pensée, Et tenant par la main les plus jeunes de nous, À la veuve, à l'enfant, qui tombaient à genoux, Disait, en essuyant les pleurs de leurs paupières Je vous donne un peu d'or, rendez-leur vos prières ! Voilà le seuil, à l'ombre, où son pied nous berçait, La branche du figuier que sa main abaissait, Voici l'étroit sentier où, quand l'airain sonore Dans le temple lointain vibrait avec l'aurore, Nous montions sur sa trace à l'autel du Seigneur Offrir deux purs encens, innocence et bonheur ! C'est ici que sa voix pieuse et solennelle Nous expliquait un Dieu que nous sentions en elle, Et nous montrant l'épi dans son germe enfermé, La grappe distillant son breuvage embaumé, La génisse en lait pur changeant le suc des plantes, Le rocher qui s'entrouvre aux sources ruisselantes, La laine des brebis dérobée aux rameaux Servant à tapisser les doux nids des oiseaux, Et le soleil exact à ses douze demeures, Partageant aux climats les saisons et les heures, Et ces astres des nuits que Dieu seul peut compter, Mondes où la pensée ose à peine monter, Nous enseignait la foi par la reconnaissance, Et faisait admirer à notre simple enfance Comment l'astre et l'insecte invisible à nos yeux Avaient, ainsi que nous, leur père dans les cieux ! Ces bruyères, ces champs, ces vignes, ces prairies, Ont tous leurs souvenirs et leurs ombres chéries. Là, mes sœurs folâtraient, et le vent dans leurs jeux Les suivait en jouant avec leurs blonds cheveux ! Là, guidant les bergers aux sommets des collines, J'allumais des bûchers de bois mort et d'épines, Et mes yeux, suspendus aux flammes du foyer, Passaient heure après heure à les voir ondoyer. Là, contre la fureur de l'aquilon rapide Le saule caverneux nous prêtait son tronc vide, Et j'écoutais siffler dans son feuillage mort Des brises dont mon âme a retenu l'accord. Voilà le peuplier qui, penché sur l'abîme, Dans la saison des nids nous berçait sur sa cime, Le ruisseau dans les prés dont les dormantes eaux Submergeaient lentement nos barques de roseaux, Le chêne, le rocher, le moulin monotone, Et le mur au soleil où, dans les jours d'automne, Je venais sur la pierre, assis près des vieillards, Suivre le jour qui meurt de mes derniers regards ! Tout est encor debout; tout renaît à sa place : De nos pas sur le sable on suit encor la trace; Rien ne manque à ces lieux qu'un cœur pour en jouir, Mais, hélas ! l'heure baisse et va s'évanouir.
La vie a dispersé, comme l'épi sur l'aire, Loin du champ paternel les enfants et la mère, Et ce foyer chéri ressemble aux nids déserts D'où l'hirondelle a fui pendant de longs hivers ! Déjà l'herbe qui croît sur les dalles antiques Efface autour des murs les sentiers domestiques, Et le lierre, flottant comme un manteau de deuil, Couvre à demi la porte et rampe sur le seuil; Bientôt peut-être... ! écarte, ô mon Dieu ! ce présage ! B ientôt un étranger, inconnu du village, Viendra, l'or à la main, s'emparer de ces lieux Qu'habite encor pour nous l'ombre de nos aïeux, Et d'où nos souvenirs des berceaux et des tombes S'enfuiront à sa voix, comme un nid de colombes Dont la hache a fauché l'arbre dans les forêts, Et qui ne savent plus où se poser après !
Ne permets pas, Seigneur, ce deuil et cet outrage ! Ne souffre pas, mon Dieu, que notre humble héritage Passe de mains en mains troqué contre un vil prix, Comme le toit du vice ou le champ des proscrits Qu'un avide étranger vienne d'un pied superbe Fouler l'humble sillon de nos berceaux sur l'herbe, Dépouiller l'orphelin, grossir, compter son or Aux lieux où l'indigence avait seule un trésor, Et blasphémer ton nom sous ces mêmes portiques Où ma mère à nos voix enseignait tes cantiques Ah ! que plutôt cent fois, aux vents abandonné, Le toit pende en lambeaux sur le mur incliné; Que les fleurs du tombeau, les mauves, les épines, Sur les parvis brisés germent dans les ruines ! Que le lézard dormant s'y réchauffe au soleil, Que Philomèle y chante aux heures du sommeil, Que l'humble passereau, les colombes fidèles, Y rassemblent en paix leurs petits sous leurs ailes, Et que l'oiseau du ciel vienne bâtir son nid Aux lieux où l'innocence eut autrefois son lit ! Ah ! si le nombre écrit sous l'œil des destinées Jusqu'aux cheveux blanchis prolonge mes années, Puissé-je, heureux vieillard, y voir baisser mes jours Parmi ces monuments de mes simples amours Et quand ces toits bénis et ces tristes décombres Ne seront plus pour moi peuplés que par des ombres, Y retrouver au moins dans les noms, dans les lieux, Tant d'êtres adorés disparus de mes yeux ! Et vous, qui survivrez à ma cendre glacée, Si vous voulez charmer ma dernière pensée, Un jour, élevez-moi... ! non ! ne m'élevez rien Mais près des lieux où dort l'humble espoir du chrétien, Creusez-moi dans ces champs la couche que j'envie Et ce dernier sillon où germe une autre vie ! Étendez sur ma tête un lit d'herbes des champs Que l'agneau du hameau broute encore au printemps, Où l'oiseau, dont mes sœurs ont peuplé ces asiles, Vienne aimer et chanter durant mes nuits tranquilles; Là, pour marquer la place où vous m'allez coucher, Rouez de la montagne un fragment de rocher; Que nul ciseau surtout ne le taille et n'efface La mousse des vieux jours qui brunit sa surface, Et d'hiver en hiver incrustée à ses flancs, Donne en lettre vivante une date à ses ans Point de siècle ou de nom sur cette agreste page ! Devant l'éternité tout siècle est du même âge, Et celui dont la voix réveille le trépas Au défaut d'un vain nom ne nous oubliera pas ! Là, sous des cieux connus, sous les collines sombres, Qui couvrirent jadis mon berceau de leurs ombres, Plus près du sol natal, de l'air et du soleil, D'un sommeil plus léger j'attendrai le réveil ! Là, ma cendre, mêlée à la terre qui m'aime, Retrouvera la vie avant mon esprit même, Verdira dans les prés, fleurira dans les fleurs, Boira des nuits d'été les parfums et les pleurs; Et, quand du jour sans soir la première étincelle Viendra m'y réveiller pour l'aurore éternelle, En ouvrant mes regards je reverrai des lieux Adorés de mon cœur et connus de mes yeux, Les pierres du hameau, le clocher, la montagne, Le lit sec du torrent et l'aride campagne; Et, rassemblant de l'œil tous les êtres chéris Dont l'ombre près de moi dormait sous ces débris, Avec des sœurs, un père et l'âme d'une mère, Ne laissant plus de cendre en dépôt à la terre, Comme le passager qui des vagues descend Jette encore au navire un œil reconnaissant, Nos voix diront ensemble à ces lieux pleins de charmes L'adieu, le seul adieu qui n'aura point de larmes !
Milly o la tierra natal
¿Por qué, pues, pronunciar ese nombre de patria? En su exilio brillante se estremece mi pecho y resuena de lejos en el alma afligida como lo hacen los pasos o la voz de un amigo.
¡Oh montañas veladas por la niebla de otoño, valles que entapizaban las escarchas del alba, sauces cuya corona deshojaba la poda, viejas torres doradas por el sol de la tarde,
muros negros del tiempo, lomas, cuestas abruptas, manantial donde van a beber los pastores, gota a gota esperando aguas raras y límpidas, con sus urnas dispuestas mientras hablan del día!
Choza que hace brillar el fulgor de la lumbre y que amaba el viajero por humear a lo lejos, sólo objetos, ¿o acaso tenéis alma también que se pega a nuestra alma y a la fuerza de amar?
Yo vi cielos azules cuya noche es sin brumas, toda de oro hasta el alba bajo un brillo de estrellas que en su curva infinita redondeaban la cúpula de cristal que jamás ha empañado algún viento. Y vi montes cargados de limones y olivas reflejar en las aguas sus inquietos perfiles; y en sus valles profundos al impulso del céfiro balancearse la espiga y la cepa madura; en los mares que apenas son un leve murmullo vi del agua luciente la ondulante cintura aprentando y soltando en sus pliegues azules de sus riscos mellados los contornos inciertos extenderse en el golfo como mantos de luz, y blanqueando el escollo con sus flores de espuma llevar hasta lo lejos de un poniente rojizo islas» que eran el lecho como de oro del sol; allí abriéndose a mí me mostraban sin límite todo un mar infinito donde habita el misterio; vi las cumbres altivas, cual del aire pirámides, donde estío fundía el abrigo invernal, descendiendo en peldaños hasta el fondo de valles con laderas pobladas por aldeas y frondas, con picachos y rocas que se yerguen, bajando en pendientes de hierba para huir deslizándose, mientras curvas humeantes, con un ruido de trueno sus torrentes de espuma y sus ríos en polvo, en sus flancos que son ya de luz ya de sombra, con oleadas oscuras y con islas radiantes, se ven valles profundos caros al soñador, ascendiendo, bajando y ascendiendo otra vez, y allí desde la raíz de sus amplias murallas, entre abetos y robles por la tierra esparcidos, en los lagos o espejos que a su sombra dormitan dar sus verdes reflejos o su imagen oscura, y en el tibio azul claro de estas límpidas aguas ser la nieve un temblor y algo fluido los cerros. Visité esas orillas y ese albergue divino que la sombra del vate eligió como tumba, esos campos que pudo la Sibila-" mostrarle, y el Elíseo y Cumas; y a pesar de todo eso no está allí el corazón...
Pero existe también una estéril montaña que no tiene ni bosques ni hontanares, con una cumbre humilde minada por la acción de los años, que por su propio peso día a día se inclina y que pierde su tierra derramada en barrancos conservando un boj seco de raíz descarnada, con roquedos a punto de caer si los pisa con su pata ligera algún chivo nervioso. Con el tiempo esos restos al caer han formado como un cerro que mengua y que va escalonándose hasta muros que sirven de pared protectora a unos campos avaros que ha regado el sudor; unas cepas con brazos que no encuentran sus arces por la tierra serpean o en la arena se arrastran, y hay zarzales en donde el zagal de la aldea coge un fruto olvidado que disputa a los pájaros; allí ovejas escuálidas de las chozas vecinas ramonean dejando entre espinos su lana. Lugar donde la música de las aguas de estío o el temblor del follaje que sacuden las brisas o los himnos que entrega el ruiseñor a los aires, no conmueven el pecho ni el oído seducen, sino que bajo un cielo que es de bronce perpetuo la cigarra ensordece con su grito escondido. Hay en estos desiertos una rústica casa que recibe tan sólo de este monte la sombra, con paredes golpeadas por la lluvia y los vientos, con los musgos antiguos ocultando su edad. En su umbral pueden verse tres peldaños de piedra y allí puso el azar de una yedra las raíces que mezclando cien veces sus enredos de nudos con sus brazos esconde las injurias del tiempo, y curvando en un arco sus volutas agrestes es el único adorno de aquel rústico porche. Un jardín que desciende por el flanco de un cerro muestra cara al poniente un sediento arenal. No sujeta, la piedra que el invierno ha tiznado es el triste jalón del recinto minúsculo. Esa tierra que hieren las azadas exhibe sus entrañas desnudas de la hierba y la sombra; ni esmaltadas alfombras ni el verdor hecho bóveda, ni un arroyo en los bosques, ni frescor ni murmullo; solamente seis tilos que el arado olvidó, con un poco de hierba extendida a sus pies dan en tiempo de otoño sombra tibia y escasa, que es más grata a la frente bajo un cielo tan duro; árboles que en sus frondas, en mi infancia feliz, albergaron los sueños más hermosos que tuve. En aquellos lugares que suspiran por agua hay un pozo en la roca que el frescor nos esconde, y allí el viejo, después, de muy largos esfuerzos, mientras gime descansa su urna sobre el brocal; la era donde el mayal sobre tierra pisada bate rítmicamente las dispersas gavillas, y la blanca paloma y el humilde gorrión se disputan la espiga que el rastrillo olvidó; y esparcidas por tierra, herramientas del campo, yugos rotos y carros que duermen bajo porches, ejes ya sin los rayos que quebró la rodada, y la reja inservible que embotaron los surcos.
Nada alivia la vista de su estéril prisión, ni las cúpulas áureas de soberbias ciudades, ni la senda de polvo, ni a lo lejos un no, ni los blancos tejados a la luz de la aurora. Solamente esparcidos de distancia en distancia los refugios agrestes que los pobres habitan, junto a sendas estrechas que dispuso el desorden, con tejados de bálago y paredes ahumadas, se ven donde el anciano que se sienta a la puerta, en su cuna de juncos duerme al niño que llora. ¡Una tierra sin sombra, sin colores los cielos, unos valles sin agua! ¡Y allí está el corazón! Éstos son los lugares, los sagrados parajes de los cuales el alma rememora la imagen, y que forjan de noche mis ensueños más bellos hechizando los ojos con antiguas visiones.
Allí cada momento, cada aspecto del monte, cada ruido que se alza por la noche en los campos, cada mes que retorna como un paso del tiempo, y hace verdes o mustia esos bosques y prados, y la luna que mengua o que crece en la sombra, y la estrella que asciende por la oscura colina, los rebaños del monte que la escarcha ha expulsado y que vuelven al valle con su andar vacilante, viento, espino florido, hierba verde o marchita, y la reja en el surco y en los prados el agua, todo me habla una lengua que resuena aquí dentro, con palabras que entienden los sentidos y el alma: resonancias, perfumes, tempestades y rayos, y peñascos, torrentes, y esas dulces imágenes y esos viejos recuerdos que en nosotros dormitan, que un lugar nos conservan y devuelven más dulce. Allí está el corazón que se vuelve a encontrar; todo allí me recuerda, me conoce y me ama.
Allí abundan amigos en todo este horizonte, en cada árbol releo una historia pasada y también cada piedra tiene un nombre que es suyo; «¿qué más da que este nombre, como Palmira o Tebas,» no recuerde los fastos de un imperio grandioso ni la sangre vertida a la voz de un tirano o esos grandes que el hombre llama azotes de Dios? El lugar cuya trama nos cautiva la mente, que aún rebosa de fastos que no olvida nuestra alma, me parece tan grande como el campo glorioso que fue cuna o sepulcro de un imperio inseguro. ¡Nada es vil! ¡Nada es grande! Todo el alma lo mide. Al nombrar una choza puede un pecho agitarse, y sobre monumentos de los héroes y dioses el pastor pasa y silba y desvía los ojos.
He aquí el banco rústico que servía a mi padre, y la sala que oyó su voz fuerte y severa, cuando aquí los pastores, en sus rejas sentados, le contaban los surcos hechos en cada hora; o tal vez palpitante de sus días de gloria nos contaba la historia de los regios cadalsos; y aún viviendo el combate en que había luchado, al contarnos su vida la virtud enseñaba. Y el vacío lugar en que siempre mi madre, al suspiro más leve de su casa salía para hacernos llevar o la lana o el pan, y vestir la indigencia o dar vida al hambriento; y aquí están las cabañas donde su mano amante las heridas curaba con aceite y con miel, y muy cerca del lecho del anciano expirante no dejaba de abrir ese libro que da todavía esperanza al que deja la vida, recogiendo suspiros que eran casi estertores y llevando hacia Dios su postrera ansiedad, y cogiendo la mano del menor de nosotros, a la viuda y al niño, de rodillas ante ella, les decía enjugando de sus ojos las lágrimas: «Os doy un poco de oro, devolvedlo en plegarias.» Y el umbral a la sombra donde nos acunaba, y la rama de higuera que curvaba su mano, y el estrecho sendero que cuando las campanas en el templo lejano atronaban el alba, tras sus pasos subíamos al altar del Señor con el fin de ofrecerle dos inciensos muy puros que eran nuestra inocencia junto con nuestra dicha. Y su voz aquí mismo, muy piadosa y solemne, nos hablaba de un Dios que en la madre sentíamos, señalando la espiga encerrada en su germen, el racimo que daba su brebaje aromático, la ternera" trocando plantas verdes en leche, y la peña agrietada por manar de las fuentes, y la lana de oveja que a las zarzas se roba .para así tapizar dulces nidos de pájaros, y aquel sol siempre exacto en sus doce mansiones repartiendo en su entorno estaciones y horas, y esos astros nocturnos salvo a Dios incontables, mundos que el pensamiento casi no osa escalar, enseñaba la fe hija de agradecidos, y hacía admirar a nuestra simple infancia que el insecto invisible a los ojos y el astro en los cielos tenían padre igual que nosotros. Esos brezos y campos, esos prados y viñas tienen muchos recuerdos y sus sombras amadas. Aquí mismo jugaban mis hermanas, y el viento las seguía jugando con sus rubios cabellos; allí con los pastores en la cumbre del cerro encendía fogatas con ramaje y espinos, y mis ojos, pendientes de las llamas del fuego las veían ondear horas y horas enteras. Allí contra el furor del temible aquilón este sauce vacío nos prestaba su tronco, y yo oía silbar en su fronda ya muerta brisas que aún rememora como música el alma. Y aquí el álamo está, inclinado al abismo, que en el tiempo de nidos nos mecía en su copa, y el arroyo en los prados cuyas aguas dormidas lentamente inundaban nuestras barcas de caña, y la encina, la peña, el molino monótono, y aquel muro que al sol, en los días de otoño, me veía sentado, cerca de los ancianos, contemplando el crepúsculo con atenta mirada. Todo aún sigue en pie y en su sitio renace; aún seguimos las huellas de mi andar por la arena; sólo un corazón falta que lo pueda gozar. ¡Ay de mí! Que la luz disminuye y se pierde. Como espigas en la era, dispersó la existencia lejos de la paterna heredad a los hijos, y a la madre también, y ese hogar tan amado se parece a los nidos de los cuales ha huido la veloz golondrina en los largos inviernos. Ya la hierba que crece en las losas antiguas borra en torno a los muros los senderos domésticos, y la hiedra, flotando como un manto de luto, cubre a medias la puerta y hasta invade el umbral. Tal vez pronto... ¡Oh Dios mío, oh presagio funesto!, tal vez pronto un extraño al que nadie conoce, con el oro en la mano del lugar se hará dueño, oh lugares que habitan, según nuestra memoria, tantas sombras queridas, familiares, y entonces todos nuestros recuerdos de las cunas y tumbas, huirán a su voz igual que las palomas echarán a volar de su nido en el árbol de los bosques que el hacha abatió para siempre, y que ya no sabrán donde van a posarse. ¡No permitas, Señor, tanto llanto y ofensa! No toleres, Dios mío, que nuestra humilde herencia pase de mano en mano a vil precio comprada, como el techo de gentes que vivieron del vicio, arruinados, o el campo que fue de unos proscritos. Que un extraño avariento venga con paso altivo y que pise el humilde surco que años atrás fue también nuestra cuna sobre un campo de hierba, a expoliar a los huérfanos, a contar sus monedas donde sólo tenía la pobreza un tesoro, blasfemando tu nombre aquí bajo estos pórticos donde antaño mi madre enseñaba a la voz de sus hijos los cánticos que exaltaban tu gloria. Ah, prefiero cien veces que entregada a los vientos penda roto el tejado sobre el muro decrépito; que las flores mortuorias, los espinos, las malvas, broten entre las ruinas de los atrios deshechos. Que el lagarto dormido allí al sol se caliente, que en las horas del sueño Filomela allí cante, que el humilde gorrión y las fieles palomas allí junten en paz bajo el ala a sus crías, y que el ave del cielo tenga allí su nidada donde antaño durmió la inocencia en su lecho. Ah, si el número escrito por los altos destinos alcanzara la edad de los blancos cabellos, ojalá, feliz viejo, allí mengüen mis días entre tales recuerdos de mis simples amores. Y ojalá cuando sean los benditos tejados y estos tristes escombros para mí solamente todo un pueblo de sombras, ojalá pueda entonces reencontrar en los nombres, en los mismos lugares, tantos seres amados que los ojos no ven. Y vosotros que acaso viviréis cuando yo sea helada ceniza, si queréis dedicarme algo grato al recuerdo, elevadme algún día... Pero no, no elevéis nada que me recuerde; sólo cerca del sitio donde duerme la humilde esperanza de aquellos que llamamos cristianos, en los campos cavadme ese lecho que quiero, como el último surco donde va a germinar otra vida. Extended sobre mí un lecho herboso que el cordero del pueblo ramonee en primavera, donde todos los pájaros que años ha mis hermanas consiguieron que fueran del lugar habitantes, aquí acudan a amar y también a cantar en mis noches tranquilas. Y para señalar mi lugar de reposo, que despeñen rodando de las altas montañas un fragmento de roca; sobre todo que no haya un cincel que lo talle ni que borre ese musgo de los días antiguos que oscurece su cara, y que al paso de inviernos, incrustado en la piedra, dé en sus letras vivientes una fecha a sus años; y que no haya ni cifras ni mi nombre grabado en tal página agreste. Ante la eternidad toda edad se confunde, y Aquel que con su voz a los muertos despierta, aunque falte mi nombre sé que no va a olvidarme. Allí bajo mis cielos, al pie de las colinas que cubrieron antaño con sus sombras mi cuna, junto al suelo natal, junto al aire y al sol, con un sueño muy leve esperaré el despertar. Mi ceniza mezclada con la tierra que me ama volverá a tener vida incluso antes que el alma, será verde en los prados y color en las flores, en las noches de estío beberá los perfumes y los llantos del aire; y al llegar de aquel día que no tiene crepúsculo la primera centella que podrá despertarme a la aurora sin fin, cuando se abran los ojos volveré a ver lugares que en mi vida adoré y que vi tantas veces, nuestra aldea y sus piedras con el fiel campanario, la montaña y el cauce seco de este torrente, y los campos resecos; y juntando ante mí con la nueva mirada tantos seres queridos, cuya sombra dormía aquí cerca entre escombros, mis hermanas, un padre y una madre que es alma, no dejando cenizas que conserve la tierra, igual que el viajero desembarca y dirige al navío miradas en las que hay gratitud, nuestras voces dirán al unísono entonces a todo este lugar que rebosa delicias nuestro único adiós ya sin mezcla de lágrimas.Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 3:30 AM |
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Alphonse de Lamartine -Tristesse- |
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Tristesse Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Ramenez-moi, disais-je, au fortuné rivage Où Naples réfléchit dans une mer d'azur Ses palais, ses coteaux, ses astres sans nuage, Où l'oranger fleurit sous un ciel toujours pur. Que tardez-vous? Partons! Je veux revoir encore Le Vésuve enflammé sortant du sein des eaux; Je veux de ses hauteurs voir se lever l'aurore; Je veux, guidant les pas de celle que j'adore, Redescendre, en rêvant, de ces riants coteaux; Suis-moi dans les détours de ce golfe tranquille; Retournons sur ces bords à nos pas si connus, Aux jardins de Cinthie, au tombeau de Virgile, Près des débris épars du temple de Vénus : Là, sous les orangers, sous la vigne fleurie, Dont le pampre flexible au myrte se marie, Et tresse sur ta tête une voûte de fleurs, Au doux bruit de la vague ou du vent qui murmure, Seuls avec notre amour, seuls avec la nature, La vie et la lumière auront plus de douceurs.
De mes jours pâlissants le flambeau se consume, Il s'éteint par degrés au souffle du malheur, Ou, s'il jette parfois une faible lueur, C'est quand ton souvenir dans mon sein le rallume; Je ne sais si les dieux me permettront enfin D'achever ici-bas ma pénible journée. Mon horizon se borne, et mon oeil incertain Ose l'étendre à peine au-delà d'une année. Mais s'il faut périr au matin, S'il faut, sur une terre au bonheur destinée, Laisser échapper de ma main Cette coupe que le destin Semblait avoir pour moi de roses couronnée, Je ne demande aux dieux que de guider mes pas Jusqu'aux bords qu'embellit ta mémoire chérie, De saluer de loin ces fortunés climats, Et de mourir aux lieux où j'ai goûté la vie.
Tristeza
Devuélvame, decía, a la afortunada orilla donde Nápoles reflexiona en un mar de azul sus palacios, sus laderas, sus astros sin nube, donde el naranjo florece bajo un cielo siempre puro. ¿ Que tarda? ¡ Vayámonos! Todavía quiero ver de nuevo Vesubio encendido saliente del pecho de las aguas; quiero de sus alturas ver levantarse la aurora; Quiero, guiando del que adoro, volver a bajar, soñando, de estas risueñas laderas; Soy en los rodeos de este golfo tranquilo; regresemos sobre estos bordes a nuestros pasos tan conocidos, a los jardines de Cintia, a la tumba de Virgilio, cerca de los pedazos dispersos del templo de Vénus: Allí, bajo los naranjos, bajo la vid florida, cuyo pámpano flexible en el myrte se casa, y trenza en tu cabeza una bóveda de flores, al ruido dulce de la ola o del viento que murmura, sólo con nuestro amor, sólo con la naturaleza, la vida y la luz tendrán más dulzuras.
De mis días pasados la antorcha se consume, se apaga por grados al soplo de la desgracia, O, si lanza a veces una luz débil, es cuando tu memoria en mi pecho lo vuelve a encender; no sé si los dioses me permitirán por fin terminar aquí abajo mi día penoso. Mi horizonte se limita, y mi ojo incierto atrévete a extenderlo apenas más allá de un año. Pero si hay que perecer por la mañana, si hace falta, sobre una tierra a la felicidad destinada, dejar escapar de mi mano esta copa que el destino parecía tener para mí de rosas coronada, les pido a los dioses sólo guiar mis pasos hasta los bordes que embellece tu memoria querida, de saludar de lejos estos afortunados climas, y de morir a los lugares donde probé la vida.Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 3:23 AM |
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Alphonse de Lamartine -L'isolement- |
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L'isolement Alphonse de Lamartine (1790-1869)
Souvent sur la montagne, à l'ombre du vieux chêne, Au coucher du soleil, tristement je m'assieds ; Je promène au hasard mes regards sur la plaine, Dont le tableau changeant se déroule à mes pieds. Ici gronde le fleuve aux vagues écumantes ; Il serpente, et s'enfonce en un lointain obscur ; Là le lac immobile étend ses eaux dormantes Où l'étoile du soir se lève dans l'azur.
Au sommet de ces monts couronnés de bois sombres, Le crépuscule encor jette un dernier rayon ; Et le char vaporeux de la reine des ombres Monte, et blanchit déjà les bords de l'horizon.
Cependant, s'élançant de la flèche gothique, Un son religieux se répand dans les airs : Le voyageur s'arrête, et la cloche rustique Aux derniers bruits du jour mêle de saints concerts.
Mais à ces doux tableaux mon âme indifférente N'éprouve devant eux ni charme ni transports ; Je contemple la terre ainsi qu'une ombre errante Le soleil des vivants n'échauffe plus les morts.
De colline en colline en vain portant ma vue, Du sud à l'aquilon, de l'aurore au couchant, Je parcours tous les points de l'immense étendue, Et je dis : " Nulle part le bonheur ne m'attend. "
Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières, Vains objets dont pour moi le charme est envolé ? Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères, Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé !
Que le tour du soleil ou commence ou s'achève, D'un oeil indifférent je le suis dans son cours ; En un ciel sombre ou pur qu'il se couche ou se lève, Qu'importe le soleil ? je n'attends rien des jours.
Quand je pourrais le suivre en sa vaste carrière, Mes yeux verraient partout le vide et les déserts : Je ne désire rien de tout ce qu'il éclaire; Je ne demande rien à l'immense univers.
Mais peut-être au-delà des bornes de sa sphère, Lieux où le vrai soleil éclaire d'autres cieux, Si je pouvais laisser ma dépouille à la terre, Ce que j'ai tant rêvé paraîtrait à mes yeux !
Là, je m'enivrerais à la source où j'aspire ; Là, je retrouverais et l'espoir et l'amour, Et ce bien idéal que toute âme désire, Et qui n'a pas de nom au terrestre séjour !
Que ne puîs-je, porté sur le char de l'Aurore, Vague objet de mes voeux, m'élancer jusqu'à toi ! Sur la terre d'exil pourquoi resté-je encore ? Il n'est rien de commun entre la terre et moi.
Quand là feuille des bois tombe dans la prairie, Le vent du soir s'élève et l'arrache aux vallons ; Et moi, je suis semblable à la feuille flétrie : Emportez-moi comme elle, orageux aquilons !
Aislamiento
A menudo en el monte, bajo algún viejo roble, viendo el sol que se pone tristemente me siento; dejo que todo el llano mis miradas abarquen, el cambiante paisaje que se extiende a mis pies.
Aquí el río con olas espumosas murmura, serpentea y se pierde en oscuros confines; allí inmóvil el lago es un agua dormida, con la estrella de Venus adornando su azul.
En la cima, que bosques muy sombríos coronan, el crepúsculo pone su fulgor postrimero; y el brumoso carruaje que conduce las sombras emblanquece, elevándose todo el amplio horizonte.
De la gótica flecha surge entonces un son religioso que invade todo el aire; el viajero se detiene y escucha la campana que mezcla a los últimos ruidos de aquel día su canto.
Pero halagos así no conmueven mi alma, que parece insensible, incapaz de emoción; y contemplo la tierra como un vago fantasma: no calienta a los muertos este sol de los vivos.
De colina en colina pongo en vano mis ojos, desde el norte hasta el sur, de la aurora al poniente, y me digo: «No existe ni un lugar en el mundo donde pueda pensar que me espera la dicha».
¿Qué me importan los valles, los palacios, las chozas? Sus encantos son vanos, para mí nada cuentan. Ríos, montes y bosques, soledades amadas, sólo un ser está ausente y todo es un desierto.
Miraré indiferente los caminos del sol, qué más da si en su inicio o en su parte final; si se pone o si nace entre nubes o azul, ¿a mí el sol qué me importa? Nada espero del día.
Si pudiera seguirle en su larga carrera por doquier yo vería el vacío y el páramo. Nada quiero de todo lo que el sol ilumina, nada quiero tener del inmenso universo.
Mas tal vez más allá de su curva celeste, donde el sol verdadero otros cielos alumbra, si pudiera dejar mis despojos aquí lo que tanto he soñado se mostrara a mis ojos.
Allí me embriagaría en la fuente deseada y volviera a encontrar esperanza y amor, ese bien ideal al que aspiran las almas y que no tienen nombre aquí abajo en la tierra.
¡Si pudiera en el carro de la Aurora elevarme vago fin de mis ansias, en el cielo hasta ti! ¿Por qué aún sigo atado a esta tierra de exilio? Entre la tierra y yo nada existe en común.
Cuando la hoja del bosque cae sobre los prados, cuando el viento nocturno la arrebata a los valles, yo quisiera también ser esa hoja caída: ¡Arrastradme como ella, aquilones, borrascas!Libellés : Alphonse de Lamartine |
posted by Alfil @ 3:12 AM |
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Valery Larbaud -Le don de soi-même- |
mardi, mai 24, 2005 |
Le don de soi-même Valery Larbaud (1881-1957)
Je m'offre à chacun comme sa récompense ; Je vous la donne même avant que vous l'ayez méritée.
Il y a quelque chose en moi, Au fond de moi, au centre de moi, Quelque chose d'infiniment aride Comme le sommet des plus abruptes montagnes ; Quelque chose de comparable au point mort de la rétine,
Et sans écho, Et qui pourtant voit et entend ; Un être ayant une vie propre, et qui, cependant, Vit toute ma vie, et écoute, impassible, Tous les bavardages de ma conscience.
Un être fait de néant, si c'est possible, Insensible à mes souffrances physiques, Qui ne pleure pas quand je pleure, Qui ne rit pas quand je ris, Qui ne rougit pas quand je commets une action honteuse, Et qui ne gémit pas quand mon coeur est blessé ; Qui se tient immobile et ne donne pas de conseils, Mais semble dire éternellement : "Je suis là, indifférent à tout".
C'est peut-être du vide comme est le vide, Mais si grand que le Bien et le Mal ensemble Ne le remplissent pas. La haine y meurt d'asphyxie, Et le plus grand amour n'y pénètre jamais.
Prenez donc tout de moi : le sens de mes poèmes, Non ce qu'on lit, mais ce qui paraît au travers malgré moi : Prenez, prenez, vous n'avez rien. Et où que j'aille, dans l'univers entier, Je rencontre toujours, Hors de moi comme en moi, L'irremplissable Vide, L'inconquérable Rien.
El don de sí mismo
Me ofrezco a cada uno como su recompensa; Se la doy incluso antes de que la hayan merecido.
Hay algo en mí, En el fondo de mí, en el centro de mí, Algo infinitamente árido Como la cima de las altas montañas; Algo comparable al punto muerto de la retina, Y sin eco, Y que sin embargo ve y oye; Un ser con vida propia, el cual, sin embargo, Vive toda mi vida y escucha, impasible, todos los parloteos de mi conciencia.
Un ser hecho de nada, si fuese posible, insensible a mis sufrimientos físicos, que no llora cuando lloro, Que no ríe cuando río, Que no se avergüenza cuando cometo una acción vergonzosa, Y que no gime cuando mi corazón está herido; Que se queda inmóvil y no da consejos. Pero parece decir eternamente: "Estoy aquí, indiferente a todo."
Es quizás vacío como lo es el vacío, Pero tan grande que el Bien y el Mal juntos No lo llenan. El odio muere ahí de asfixia, Y ahí el amor más grande no penetra nunca. Tomad por lo tanto todo de mí: el sentido de estos poemas, No lo que se lee, sino lo que habla a través mío a mi pesar: Tomad, tomad, no tenéis nada. Y adonde vaya, en el universo entero, Encuentro siempre, Fuera de mí como en mí, El irremplazable Vacío, La inconquistable Nada.
Versión de Claire DeloupyLibellés : Valery Larbaud |
posted by Alfil @ 4:33 AM |
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Lautreamont -Les Chants de Maldoror- Chant Premier I |
samedi, mai 21, 2005 |
Les Chants de Maldoror -Chant Premier I Comte de Lautréamont (Isidore Ducasse) (Uruguay, 1846-1870)
I Plût au ciel que le lecteur, enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu'il lit, trouve, sans se désorienter, son chemin abrupt et sauvage, à travers les marécages désolés de ces pages sombres et pleines de poison; car, à moins qu'il n'apporte dans sa lecture une logique rigoureuse et une tension d'esprit égale au moins à sa défiance, les émanations mortelles de ce livre imbiberont son âme comme l'eau le sucre. Il n'est pas bon que tout le monde lise les pages qui vont suivre; quelques-uns seuls savoureront ce fruit amer sans danger. Par conséquent, âme timide, avant de pénétrer plus loin dans de pareilles landes inexplorées, dirige tes talons en arrière et non en avant. Écoute bien ce que je te dis: dirige tes talons en arrière et non en avant, comme les yeux d'un fils qui se détourne respectueusement de la contemplation auguste de la face maternelle; ou, plutôt, comme un angle à perte de vue de grues frileuses méditant beaucoup, qui, pendant l'hiver, vole puissamment à travers le silence, toutes voiles tendues, vers un point déterminé de l'horizon, d'où tout à coup part un vent étrange et fort, précurseur de la tempête. La grue la plus vieille et qui forme à elle seule l'avant-garde, voyant cela, branle la tête comme une personne raisonnable, conséquemment son bec aussi qu'elle fait claquer, et n'est pas contente (moi, non plus, je ne le serais pas à sa place), tandis que son vieux cou, dégarni de plumes et contemporain de trois générations de grues, se remue en ondulations irritées qui présagent l'orage qui s'approche de plus en plus. Après avoir de sang-froid regardé plusieurs fois de tous les côtés avec des yeux qui renferment l'expérience, prudemment, la première (car, c'est elle qui a le privilége de montrer les plumes de sa queue aux autres grues inférieures en intelligence), avec son cri vigilant de mélancolique sentinelle, pour repousser l'ennemi commun, elle vire avec flexibilité la pointe de la figure géométrique (c'est peut-être un triangle, mais on ne voit pas le troisième côté que forment dans l'espace ces curieux oiseaux de passage), soit à bâbord, soit à tribord, comme un habile capitaine; et, manoeuvrant avec des ailes qui ne paraissent pas plus grandes que celles d'un moineau, parce qu'elle n'est pas bête, elle prend ainsi un autre chemin philosophique et plus sûr.
Los Cantos de Maldoror -Canto Primero I I Ruego al cielo que el lector, animado y momentáneamente tan feroz como lo que lee, encuentre, sin desorientarse, su camino abrupto y salvaje, a través de las desoladas ciénagas de estas páginas sombrías y llenas de veneno, pues, a no ser que aporte a su lectura una lógica rigurosa y una tensión espiritual semejante al menos a su desconfianza, las emanaciones mortales de este libro impregnarán su alma lo mismo que hace el agua con el azúcar. No es bueno que todo el mundo lea las páginas que van a seguir; sólo algunos podrán saborear este fruto amargo sin peligro. En consecuencia, alma tímida, antes de que penetres más en semejantes landas inexploradas, dirige tus pasos hacia atrás y no hacia adelante, de igual manera que los ojos de un hijo se apartan respetuosamente de la augusta contemplación del rostro materno; o, mejor, como durante el invierno, en la lejanía, un ángulo de grullas friolentas y meditabundas vuela velozmente a través del silencio, con todas las velas desplegadas, hacia un punto determinado del horizonte, de donde, súbitamente, parte un viento extraño y poderoso, precursor de la tempestad. La grulla más vieja, formando ella sola la vanguardia, al ver esto mueve la cabeza, y, consecuentemente, hace restallar también el pico, como una persona razonable, que no está contenta (yo tampoco lo estaría en su lugar), mientras su viejo cuello desprovisto de plumas, contemporáneo de tres generaciones de grullas, se agita en ondulaciones coléricas que presagian la tormenta, cada vez más próxima. Después de haber mirado numerosas veces, con sangre fría, a todos los lados, con ojos que encierran la experiencia, prudentemente, la primera (pues ella tiene el privilegio de mostrar las plumas de su cola a las otras grullas, inferiores en inteligencia), con su grito vigilante de melancólico centinela que hace retroceder al enemigo común, gira con flexibilidad la punta de la figura geométrica (es tal vez un triángulo, aunque no se vea el tercer lado, lo que forman en el espacio esas curiosas aves de paso), sea a babor, sea a estribor, como un hábil capitán, y, maniobrando con alas que no parecen mayores que las de un gorrión, porque no es necia, emprende así otro camino más seguro y filosófico. Libellés : Lautreamont |
posted by Alfil @ 6:49 AM |
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Lautreamont -Les Chants de Maldoror- Chant Premier II- |
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Les Chants de Maldoror -Chant Premier II- Comte de Lautréamont (Isidore Ducasse) (Uruguay, 1846-1870)
II
Lecteur, c'est peut-être la haine que tu veux que j'invoque dans le commencement de cet ouvrage! Qui te dit que tu n'en renifleras pas, baigné dans d'innombrables voluptés, tant que tu voudras, avec tes narines orgueilleuses, larges et maigres, en te renversant de ventre, pareil à un requin, dans l'air beau et noir, comme si tu comprenais l'importance de cet acte et l'importance non moindre de ton appétit légitime, lentement et majestueusement, les rouges émanations? Je t'assure, elles réjouiront les deux trous informes de ton museau hideux, ô monstre, si toutefois tu t'appliques auparavant à respirer trois mille fois de suite la conscience maudite de l'Éternel! Tes narines, qui seront démesurément dilatées de contentement ineffable, d'extase immobile, ne demanderont pas quelque chose de meilleur à l'espace, devenu embaumé comme de parfums et d'encens; car, elles seront rassasiées d'un bonheur complet, comme les anges qui habitent dans la magnificence et la paix des agréables cieux.
Los Cantos de Maldoror -Canto Primero II- II
Lector, quizás desees que invoque al odio en el comienzo de esta obra. ¿Quién te dice que no has de olfatearlo, sumergido en innumerables voluptuosidades, tanto como quieras, con tus orgullosas narices, anchas y afiladas, volviéndote de vientre, semejante a un tiburón, en el aire hermoso y negro, como si comprendieras la importancia de ese acto y la importancia no menos de tu legítimo apetito, lenta y majestuosamente, las rojas emanaciones? Te aseguro que los dos deformes agujeros de tu horroroso hocico, oh monstruo, se regocijarán, si te dispones de antemano a respirar tres mil veces seguidas la conciencia maldita de lo Eterno. Tus narices, desmesuradamente dilatadas por la inefable satisfacción, por el éxtasis inmóvil, no pedirán otra cosa al espacio, embalsamado de perfumes e incienso, pues se colmarán de una dicha completa, como los ángeles que habitan en la magnificencia y la paz de los gratos cielos. Libellés : Lautreamont |
posted by Alfil @ 6:39 AM |
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Lautreamont -Les Chants de Maldoror- Chant Premier V- |
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PLes Chants de Maldoror -Chant Premier V- Comte de Lautréamont (Isidore Ducasse) (Uruguay, 1846-1870) V J'ai vu, pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leurs semblables, et pervertir les âmes par tous les moyens. Ils appellent les motifs de leurs actions: la gloire. En voyant ces spectacles, j'ai voulu rire comme les autres; mais, cela, étrange imitation, était impossible. J'ai pris un canif dont la lame avait un tranchant acéré, et me suis fendu les chairs aux endroits où se réunissent les lèvres. Un instant je crus mon but atteint. Je regardai dans un miroir cette bouche meurtrie par ma propre volonté! C'était une erreur! Le sang qui coulait avec abondance des deux blessures empêchait d'ailleurs de distinguer si c'était là vraiment le rire des autres. Mais, après quelques instants de comparaison, je vis bien que mon rire ne ressemblait pas à celui des humains, c'est-à-dire que je ne riais pas. J'ai vu les hommes, à la tête laide et aux yeux terribles enfoncés dans l'orbite obscur, surpasser la dureté du roc, la rigidité de l'acier fondu, la cruauté du requin, l'insolence de la jeunesse, la fureur insensée des criminels, les trahisons de l'hypocrite, les comédiens les plus extraordinaires, la puissance de caractère des prêtres, et les êtres les plus cachés au dehors, les plus froids des mondes et du ciel; lasser les moralistes à découvrir leur coeur, et faire retomber sur eux la colère implacable d'en haut. Je les ai vus tous à la fois, tantôt, le poing le plus robuste dirigé vers le ciel, comme celui d'un enfant déjà pervers contre sa mère, probablement excités par quelque esprit de l'enfer, les yeux chargés d'un remords cuisant en même temps que haineux, dans un silence glacial, n'oser émettre les méditations vastes et ingrates que recélait leur sein, tant elles étaient pleines d'injustice et d'horreur, et attrister de compassion le Dieu de miséricorde; tantôt, à chaque moment du jour, depuis le commencement de l'enfance jusqu'à la fin de la vieillesse, en répandant des anathèmes incroyables, qui n'avaient pas le sens commun, contre tout ce qui respire, contre eux-mêmes et contre la Providence, prostituer les femmes et les enfants, et déshonorer ainsi les parties du corps consacrées à la pudeur. Alors, les mers soulèvent leurs eaux, engloutissent dans leurs abîmes les planches; les ouragans, les tremblements de terre renversent les maisons; la peste, les maladies diverses déciment les familles priantes. Mais, les hommes ne s'en aperçoivent pas. Je les ai vus aussi rougissant, pâlissant de honte pour leur conduite sur cette terre; rarement. Tempêtes, soeurs des ouragans; firmament bleuâtre, dont je n'admets pas la beauté; mer hypocrite, image de mon coeur; terre, au sein mystérieux; habitants des sphères; univers entier; Dieu, qui l'as créé avec magnificence, c'est toi que j'invoque: montre-moi un homme qui soit bon!... Mais, que ta grâce décuple mes forces naturelles; car, au spectacle de ce monstre, je puis mourir d'étonnement: on meurt à moins. Los Cantos de Maldoror -Canto Primero V- V He visto, durante toda mi vida, sin una sola excepción, a los hombres de hombros estrechos realizar numerosos actos estúpidos, embrutecer a sus semejantes, y pervertir a las almas por todos los medios. A los motivos de su acción le llaman: la gloria. A todos a la vez los he visto, unas veces con el puño más robusto dirigido hacia el cielo, como el de un niño ya perverso contra su madre, probablemente excitados por algún espíritu del infierno, con los ojos recargados de un remordimiento punzante y al mismo tiempo lleno de odio, en un silencio glacial, sin atreverse a manifestar las vastas e ingratas meditaciones que encubría su seno –tan llenas estaban de injusticia y horror-, y entristecer así de compasión al Dios misericordioso; otras veces, a cada momento del día, desde el comienzo de la infancia hasta el fin de la vejez, diseminando increíbles anatemas, que no tenían el sentido común, contra todo lo que respira, contra ellos mismos y contra la Providencia, prostituir a las mujeres y a los niños, y deshonrar así las partes del cuerpo consagradas al pudor. Entonces los mares levantan sus aguas, sumergen en sus abismos los maderos; los huracanes y los terremotos derriban las casas; la peste y las diversas enfermedades diezman a las familias rezantes. Pero los hombres no se dan cuenta. También los he visto enrojecer o palidecer de vergüenza por su conducta en esta tierra; raramente. Tempestades hermanas de los huracanes, firmamento azulado cuya belleza no admito, mar hipócrita, imagen de mi corazón, tierra de seno misterioso, habitantes de las esferas, universo eterno, Dios que los has creado con magnificencia, a ti te invoco: ¡muéstrame a un hombre bueno! Pero, que tu gracia decuplique mis fuerzas naturales, pues ante el espectáculo de ese monstruo, yo puedo morir de asombro: se muere por mucho menos. Libellés : Lautreamont |
posted by Alfil @ 6:34 AM |
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