Arthur Rimbaud -Les poètes de sept ans- |
mercredi, septembre 08, 2004 |
Les poètes de sept ans Arthur Rimbaud (1854-1891)
Et la Mère, fermant le livre du devoir, S'en allait satisfaite et très fière, sans voir, Dans les yeux bleus et sous le front plein d'éminences, L'âme de son enfant livrée aux répugnances.
Tout le jour il suait d'obéissance ; très Intelligent ; pourtant des tics noirs, quelques traits Semblaient prouver en lui d'âcres hypocrisies. Dans l'ombre des couloirs aux tentures moisies, En passant il tirait la langue, les deux poings A l'aine, et dans ses yeux fermés voyait des points. Une porte s'ouvrait sur le soir : à la lampe On le voyait, là-haut, qui râlait sur la rampe, Sous un golfe de jour pendant du toit. L'été Surtout, vaincu, stupide, il était entêté A se renfermer dans la fraîcheur des latrines : Il pensait là, tranquille et livrant ses narines.
Quand, lavé des odeurs du jour, le jardinet Derrière la maison, en hiver, s'illunait, Gisant au pied d'un mur, enterré dans la marne Et pour des visions écrasant son oeil darne, Il écoutait grouiller les galeux espaliers. Pitié ! Ces enfants seuls étaient ses familiers Qui, chétifs, fronts nus, oeil déteignant sur la joue, Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue Sous des habits puant la foire et tout vieillots, Conversaient avec la douceur des idiots ! Et si, l'ayant surpris à des pitiés immondes, Sa mère s'effrayait ; les tendresses, profondes, De l'enfant se jetaient sur cet étonnement. C'était bon. Elle avait le bleu regard, - qui ment !
A sept ans, il faisait des romans, sur la vie Du grand désert, où luit la Liberté ravie, Forêts, soleils, rives, savanes ! - Il s'aidait De journaux illustrés où, rouge, il regardait Des Espagnoles rire et des Italiennes. Quand venait, l'oeil brun, folle, en robes d'indiennes, - Huit ans - la fille des ouvriers d'à côté, La petite brutale, et qu'elle avait sauté, Dans un coin, sur son dos en secouant ses tresses, Et qu'il était sous elle, il lui mordait les fesses, Car elle ne portait jamais de pantalons ; - Et, par elle meurtri des poings et des talons, Remportait les saveurs de sa peau dans sa chambre.
Il craignait les blafards dimanches de décembre, Où, pommadé, sur un guéridon d'acajou, Il lisait une Bible à la tranche vert-chou ; Des rêves l'oppressaient chaque nuit dans l'alcôve. Il n'aimait pas Dieu ; mais les hommes, qu'au soir fauve, Noirs, en blouse, il voyait rentrer dans le faubourg Où les crieurs, en trois roulements de tambour, Font autour des édits rire et gronder les foules. - Il rêvait la prairie amoureuse, où des houles Lumineuses, parfums sains, pubescences d'or, Font leur remuement calme et prennent leur essor !
Et comme il savourait surtout les sombres choses, Quand, dans la chambre nue aux persiennes closes, Haute et bleue, âcrement prise d'humidité, Il lisait son roman sans cesse médité, Plein de lourds ciels ocreux et de forêts noyées, De fleurs de chair aux bois sidérals déployées, Vertige, écroulements, déroutes et pitié ! - Tandis que se faisait la rumeur du quartier, En bas, - seul, et couché sur des pièces de toile Écrue, et pressentant violemment la voile !
Los poetas de siete años
Y la Madre, cerrando el libro del deber se marcha, satisfecha y orgullosa; no ha visto en los ojos azules y en la frente abombada, el alma de su hijo esclava de sus ascos.
Durante todo el día sudaba de obediencia; muy listo; sin embargo, algunos gestos negros pintaban en sus rasgos agrias hipocresías. En el pasillo oscuro con cortinas mohosas, le sacaba la lengua, al pasar, con los puños metidos en las ingles, frunciendo el entrecejo. Una puerta se abría en la noche: la lámpara lo alumbraba en lo alto, gruñendo en la lomera, bajo un golfo de luz colgado del tejado. Sobre todo en verano, estúpido y vencido, pertinaz, se encerraba en las frescas letrinas; y allí pensaba, quieto, liberando su olfato.
Cuando el jardín, lavado del aroma del día tras la casa, en invierno se inundaba de luna, tumbado al pie de un muro, enterrado en la marga, y apretando los ojos para tener visiones, escuchaba sarnosos rumores de espaldares ¡Compasión! sólo amaba a esos niños canijos, que avanzan, sin sombrero, con mirar desteñido, hundiendo macilentos dedos, negros de barro, en mugrientos harapos que huelen a cagada y que hablan con dulzura igual que los cretinos. Y, si su madre al verlo, presa de compasiones inmundas, se asustaba, la ternura del niño, honda, se avalanzaba contra aquella extrañeza. ¡Está bien! Pues tenía el ojo azul ––¡que miente!.
A los siete, ya hacía novelas sobre el mundo del gran desierto, donde la Libertad robada luce: ¡sol, bosque, orillas, sabanas! Se ayudaba con textos ilustrados en los que, ebrio, veía Españolas que rien y también Italianas, y de pronto llegaba, loca y vestida de india, ––ocho años––, ojos negros, la hija de los obreros de al lado ––una bruta, que un día le saltó, desde un rincón, encima, agitando sus trenzas... y al verla encima de él, le mordía las nalgas, pues no llevaba nunca falda con pantalón ––Y como ella le hiriese con puños y talones, se llevó hasta su cuarto el sabor de su piel.
Temía los tristísimos domingos de diciembre, cuando, bien repeinado y en mesa de caoba, leía en una Biblia de cantos color berza; los sueños le oprimían cada noche en la alcoba. No amaba a Dios; sólo a los hombres negros con blusa, que veía, de noche, por el hosco suburbio, donde los pregoneros, tras un triple redoble de tambor, reunían entorno a las proclamas el gruñido y los gritos de aquella muchedumbre. Soñaba con praderas en amor, en las que olas luminosas, perfumes y pubescencias de oro se agitan lentamente hasta emprender el vuelo.
Y al gozar, ante todo, con las cosas umbrías, cuando en la habitación, con la persiana echada, alta, azul, aunque llena de ásperas humedades, leía su novela mil veces meditada, cargada de ocres cielos y bosques sumergidos, y de flores de carne que hacia el cielo se abrían, ¡vértigos y derrubios, fracaso y compasión! ––Mientras iba creciendo el rumor del suburbio en la calle––, acostado, solo, sobre cretonas crudas, y presintiendo la vela con furorLibellés : Arthur Rimbaud |
posted by Alfil @ 3:29 PM |
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