La Loreley Guillaume Apollinaire (1880 - 1918)
A Bacharach il y avait une sorcière blonde Qui laissait mourir d'amour tous les hommes à la ronde
Devant son tribunal l'évêque la fit citer D'avance il l'absolvit à cause de sa beauté
O belle Loreley aux yeux pleins de pierreries De quel magicien tiens-tu ta sorcellerie
Je suis lasse de vivre et mes yeux sont maudits Ceux qui m'ont regardée évêque en ont péri
Mes yeux ce sont des flammes et non des pierreries Jetez jetez aux flammes cette sorcellerie
Je flambe dans ces flammes Ô belle Loreley Qu'un autre te condamne tu m'as ensorcelé
Faites-moi donc mourir puisque je n'aime rien Evêque vous riez Priez plutôt pour moi la Vierge
Faites-moi donc mourir et que Dieu vous protège Mon amant est parti pour un pays lointain
Mon coeur me fait si mal il faut bien que je meure Si je me regardais il faudrait que j'en meure
Mon coeur me fait si mal depuis qu'il n'est plus là Mon coeur me fit si mal du jour où il s'en alla
L'évêque fit venir trois chevaliers avec leurs lances Menez jusqu'au couvent cette femme en démence
Va t'en Lore en folie va Lore aux yeux tremblants Tu seras une nonne vêtue de noir et blanc
Puis ils s'en allèrent sur la route tous les quatre La Loreley les implorait et ses yeux brillaient comme des astres
Chevaliers laissez-moi monter sur ce rocher si haut Pour voir une fois encore mon beau château
Pour me mirer une fois encore dans le fleuve Puis j'irai au couvent des vierges et des veuves
Là-haut le vent tordait ses cheveux déroulés Les chevaliers criaient Loreley Loreley
Tout là-bas sur le Rhin s'en vient une nacelle Et mon amant s'y tient il m'a vue il m'appelle
Mon coeur devient si doux c'est mon amant qui vient Elle se penche alors et tombe dans le Rhin
Pour avoir vu dans l'eau la belle Loreley Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil
La Loreley
En Bacharach vivía una rubia hechicera Que hacía morir de amor todos los hombres a la redonda
Ante su tribunal el obispo la citó un día La absolvió por adelantado a causa de su belleza
Oh bella Loreley de ojos de pedrería De qué mago tienes tu brujería
Estoy cansada de vivir y mis ojos son malditos Y los que me han mirado obispo han perecido
Mis ojos son llamas y no pedrería Arrojad arrojad al fuego esas hechicerías
Ardo en esas llamas oh bella Loreley Que otro te condene porque me has embrujado
Obispo os burláis rogad por mí a la virgen Hacedme pues morir y que Dios os proteja
Mi amante se ha ido hacia un país lejano Hacedme pues morir porque ya no amo nada
Mi corazón me hace tanto daño es necesario que muera Si mis ojos me vieran sucumbiría al hechizo
Mi corazón me duele desde que me dejó Mi corazón me duele desde que se marchó
El obispo hizo venir tres caballeros con sus lanzas Llevad hasta el convento a esta loca mujer
Vete Lore Loca Vete Lore tu mirada fulgura Serás una monja vestida de negro y blanco
Por el mismo sendero marcharon los cuatro La Loreley les imploraba y sus ojos brillaban como astros
Caballeros dejadme subir a aquella roca tan alta Para ver una vez más mi bello castillo
Para reflejarme una vez más en el río Luego iré al convento de las vírgenes y de las viudas
Allí en lo alto el viento agitaba su cabellera suelta Los caballeros gritaban Loreley Loreley
Bajando por el Rhin se acerca quien me ama Y de pie en su barquilla ya me ha visto y me llama
Calma corazón mi amante llega lentamente Ella se inclina entonces y cae en el Rhin
La bella Loreley ha visto reflejados En el agua sus ojos sus cabellos doradoLibellés : Guillaume Apollinaire |