Arthur Rimbaud -Ce qu'on dit au poète a propos de fleurs- |
mercredi, septembre 08, 2004 |
Ce qu'on dit au poète a propos de fleurs: Arthur Rimbaud (1854-1891)
A Monsieur Théodore de Banville
I Ainsi, toujours, vers l'azur noir Où tremble la mer des topazes, Fonctionneront dans ton soir Les Lys, ces clystères d'extases !
A notre époque de sagous, Quand les Plantes sont travailleuses, Le Lys boira les bleus dégoûts Dans tes Proses religieuses !
- Le Lys de monsieur de Kerdrel, Le Sonnet de mille huit cent trente, Le Lys qu'on donne au Ménestrel Avec l'oeillet et l'amarante !
Des lys ! Des lys ! On n'en voit pas ! Et dans ton Vers, tel que les manches Des Pêcheresses aux doux pas, Toujours frissonnent ces fleurs blanches !
Toujours, Cher, quand tu prends un bain, Ta chemise aux aisselles blondes Se gonfle aux brises du matin Sur les myosotis immondes !
L'amour ne passe à tes octrois Que les Lilas, - ô balançoires ! Et les Violettes du Bois, Crachats sucrés des Nymphes noires !...
II O Poètes, quand vous auriez Les Roses, les Roses soufflées, Rouges sur tiges de lauriers, Et de mille octaves enflées !
Quand Banville en ferait neiger, Sanguinolentes, tournoyantes, Pochant l'oeil fou de l'étranger Aux lectures mal bienveillantes !
De vos forêts et de vos prés, O mes paisibles photographes ! La Flore est diverse à peu près Comme des bouchons de carafes !
Toujours les végétaux Français, Hargneux, phtisiques, ridicules, Où le ventre des chiens bassets Navigue en paix, aux crépuscules ;
Toujours, après d'affreux dessins De Lotos bleus ou d'Hélianthes, Estampes roses, sujets saints Pour les jeunes communiantes !
L'Ode Açoka cadre avec la Strophe en fenêtre de lorette ; Et de lourds papillons d'éclats Fientent sur la Pâquerette.
Vieilles verdures, vieux galons ! O croquignoles végétales ! Fleurs fantasques des vieux Salons ! - Aux hannetons, pas aux crotales,
Ces poupards végétaux en pleurs Que Grandville eût mis aux lisières. et qu'allaitèrent de couleurs De méchants astres à visières !
Oui, vos bavures de pipeaux Font de précieuses glucoses ! - Tas d'oeufs frits dans de vieux chapeaux, Lys, Açokas, Lilas et Roses !...
III O blanc Chasseur, qui cours sans bas A travers le Pâtis panique, Ne peux-tu pas, ne dois-tu pas Connaître un peu ta botanique ?
Tu ferais succéder, je crains, Aux Grillons roux les Cantharides, L'or des Rios au bleu des Rhins, - Bref, aux Norwèges les Florides :
Mais, Cher, l'Art n'est plus, maintenant, - C'est la vérité, - de permettre A l'Eucalyptus étonnant Des constrictors d'un hexamètre ;
Là !... Comme si les Acajous Ne servaient, même en nos Guyanes, Qu'aux cascades des sapajous, Au lourd délire des lianes !
- En somme, une Fleur, Romarin Ou Lys, vive ou morte, vaut-elle Un excrément d'oiseau marin ? Vaut-elle un seul pleur de chandelle ?
- Et j'ai dit ce que je voulais ! Toi, même assis là-bas, dans une Cabane de bambous, - volets Clos, tentures de perse brune, -
Tu torcherais des floraisons Dignes d'Oises extravagantes ! Poète ! ce sont des raisons Non moins risibles qu'arrogantes !
IV Dis, non les pampas printaniers Noirs d'épouvantables révoltes, Mais les tabacs, les cotonniers ! Dis les exotiques récoltes !
Dis, front blanc que Phébus tanna, De combien de dollars se rente Pedro Velasquez, Habana ; Incague la mer de Sorrente
Où vont les Cygnes par milliers ; Que tes strophes soient des réclames Pour l'abatis des mangliers Fouillés des Hydres et des lames !
Ton quatrain plonge aux bois sanglants Et revient proposer aux Hommes Divers sujets de sucres blancs, De pectoraires et de gommes !
Sachons par Toi si les blondeurs Des Pics neigeux, vers les Tropiques, Sont ou des insectes pondeurs Ou des lichens microscopiques !
Trouve, ô Chasseur, nous le voulons, Quelques garances parfumées Que la Nature en pantalons Fasse éclore ! - pour nos Armées !
Trouve, aux abords du Bois qui dort, Les fleurs, pareilles à des mufles, D'où bavent des pommades d'or Sur les cheveux sombres des Buffles !
Trouve, aux prés fous, où sur le Bleu Tremble l'argent des pubescences, Des calices pleins d'Oeufs de feu Qui cuisent parmi les essences !
Trouve des Chardons cotonneux Dont dix ânes aux yeux de braises Travaillent à filer les noeuds ! Trouve des Fleurs qui soient des chaises !
Oui, trouve au coeur des noirs filons Des fleurs presque pierres, - fameuses ! -Qui vers leurs durs ovaires blonds Aient des amygdales gemmeuses !
Sers-nous, ô Farceur, tu le peux, Sur un plat de vermeil splendide Des ragoûts de Lys sirupeux Mordant nos cuillers Alfénide !
V Quelqu'un dira le grand Amour, Voleur des sombres Indulgences : Mais ni Renan, ni le chat Murr N'ont vu les Bleus Thyrses immenses !
Toi, fais jouer dans nos torpeurs, Par les parfums les hystéries ; Exalte-nous vers les candeurs Plus candides que les Maries...
Commerçant ! colon ! médium ! Ta Rime sourdra, rose ou blanche, Comme un rayon de sodium, Comme un caoutchouc qui s'épanche !
De tes noirs Poèmes, - Jongleur ! Blancs, verts, et rouges dioptriques, Que s'évadent d'étranges fleurs Et des papillons électriques !
Voilà ! c'est le Siècle d'enfer ! Et les poteaux télégraphiques Vont orner, - lyre aux chants de fer, Tes omoplates magnifiques !
Surtout, rime une version Sur le mal des pommes de terre ! - Et, pour la composition De poèmes pleins de mystère
Qu'on doive lire de Tréguier A Paramaribo, rachète Des Tomes de Monsieur Figuier, - Illustrés ! - chez Monsieur Hachette !
Lo que se le dice al poeta a propósito de las flores
A Monsieur Théodore de Banville
I Arrastrado hacia negros azules donde el mar de topacios palpita, se abrirán en tu noche los Lilios, del éxtasis ––lavativas.
Y en nuestra época de sagú cuando las plantas son laboriosas, el Lilio beberá azules tedios en tus Prosas religiosas.
Soneto del ochocientos treinta, el Lilio del señor de Kerdrel, el Lilio que se da al Menestril, el amaranto, el clavel.
Lilios, más Lilios, ¿dónde se meten? Pero en tu verso, como las mangas de Pecadoras de andares suaves, se agitan sus flores blancas.
Y siempre, Querido, al darte un baño, tu camisa de rubias axilas se llena, sobre inmundos miosotis. con las matinales brisas.
El Amor sólo abre su fielazgo a las Lilas ––¡columpios de brisa! y a las Violetas del Bosque, dulces gargajos de negras Ninfas!
II ¡Poetas, incluso si tuvierais a las Rosas, las Rosas hinchadas, rojas, sobre tallos de laurel orladas con mil octavas,
o si Banville, en forma de nieve, las lanzara, rolando, sangrientas, hiriendo el ojo del forastero en su lectura malévola...
en nuestros bosques, en nuestros prados, Oh, fotógrafos de alma serena, la Flora es tan variada como los tapones de botella!
Qué cruz de vegetación, franceses, colérica, ridícula y tísica por la que el vientre de los pachones navega, al caer el día;
qué cruz, tras los dibujos odiosos de azules Lotos y de Heliantos, para las Primeras Comuniones, de estampas rosas con santos!
La Oda al Azoka qué bien rima con la estrofa en ventana de putilla; mientras, mariposas deslumbrantes cagan en las Chirivitas.
¡Viejos follajes y viejos galones! ¡Dios, qué vegetales virguerías! ¡Flores extrañas de los Salones! ¡Echemos a las avispas
estos fofos llorones florales que Granville hubiera apadrinado y que amamantaron los colores de aciagos astros opacos!
¡Vuestros jipidos de caramillo dan glucosas la mar de preciosas! ––¡Cuántos huevos fritos con sombrero, Lilio, Rosa, Lila, Azoka!...
III Blanco Cazador que vas sin medias por los blandos pastizales pánicos ¿no puedes, no debes, ensanchar tu sapiencia de botánico?
Querrás sustituir, mucho me temo, la cantárida a los grillos rojos y las Floridas a las Noruegas: y al Rin azul Ríos de oro.
Pero, Querido, el Arte hoy en día no se rige por estos parámetros: que el raro eucaliptus se retuerza constreñido en un hexámetro
¡Basta ya!... Como si las Caobas sirvieran, incluso en las Guyanas, sólo a las cascadas de sajúes[3] con delirios de lianas.
––Veamos, ¿una Flor, el Romero o el Lilio, vale, esté viva o muerta, la caca de un pájaro marino? ¿o el lamento de una vela?
––¡Y he dicho lo que decir quería! ¡Pero incluso tú, tumbado en una choza de bambú, con la persiana echada, de persa oscura,
limpiarías el culo a flores dignas de Oises extravagantes!... ––Tus razones son, ¡Poeta!, tan risibles como arrogantes...
IV No pintes pampas primaverales, negras de atroces insurrecciones; ¡pinta tabacos y algodonales que el hombre exótico coge!
Dinos, frente que Febo curtió, de cuántos dólares es el rédito de Pedro Velázquez ––en La Habana; caga en el mar de Sorrento
por el que bogan miles de Cisnes; que tus estrofas sean proclamas por el descepe de los manglares que hidras y olas horadan.
Sume tu estrofa en bosques sangrientos y ofrece luego a tus Semejantes temas nuevos, con blancos azúcares, con gomas y expectorantes.
Dinos si el oro que cubre el Pico nevado nace, en el dulce Trópico, de un desove de insectos en vuelo o de musgos microscópicos.
¡Busca, Cazador, te lo exigimos alguna granza aromatizada que naciendo, ya, con pantalones empuñe pronto las armas!
¡Busca en la linde del Bosque en sueños flores como fauces de dragones que babean pomadas de oro por la testuz del Bisonte!
¡Busca en prados de Azul, donde tiembla la plata albar de las pubescencias, Cálices llenos de Huevos ígneos, cociendo entre las esencias!
¡Busca Cardenchas algodonosas que diez burros con ojos de brasa hilan, devanan y anudan! ¡Busca flores que sean butacas!
¡Busca en las vetas negras y hondas flores que son casi como piedras, con sus ovarios blondos y duros junto a amígdalas de gema!
¡Sírvenos, Farsante, ya que puedes, en fuente deslumbrante de plata ragúes de Lilios al sirope, para cucharas de alpaca!
V Alguien nos cantará el gran Amor, ladrón de las negras Indulgencias: ¡pero, ni Renán, ni Murr han visto la inmensa y Azul Umbela!
Artista, anima en nuestros torpores, gracias a los perfumes, locuras; elévanos hasta las purezas de las Marías más puras...
¡Comerciante, aparcero, médium! tu Rima brotará rosa o blanca como si fuera un rayo de sodio, cual caucho que se derrama.
¡Juglar, que de tus negros Poemas, blancos, verdes y rojos dióptricos, se escapen volando extrañas flores y eléctricos lepidópteros!
¡Nuestro siglo es un Siglo de infierno! Los postes y los hilos telegráficos lucirán, lira de cantos férreos por tus omóplatos mágicos.
¡Danos, ante todo, tu versión rimada del mal de la patata! ––Y para que puedas escribir versos que el misterio inflama,
leídos desde Paramaribo a Tréguier, cómprate raudamente la Gran Obra del Señor Figuier ––icon grabados, en Hachette!.Libellés : Arthur Rimbaud |
posted by Alfil @ 4:43 AM |
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