Paul Valéry -Le rameur- |
mercredi, mai 26, 2004 |
Le rameur Paul Valéry (1871-1945)
à André Lebey
Penché contre un grand fleuve, infiniment mes rames M'arrachent à regret aux riants environs; Ame aux pesantes mains, pleines des avirons, Il faut que le ciel cède au glas des lentes lames.
Le coeur dur, l'oeil distrait des beautés que je bats, Laissant autour de moi mûrir des cercles d'onde, Je veux à larges coups rompre l'illustre monde De feuilles et de feu que je chante tout bas.
Arbres sur qui je passe, ample et naïve moire, Eau de ramages peinte, et paix de l'accompli, Déchire-les, ma barque, impose-leur un pli Qui coure du grand calme abolir la mémoire.
Jamais, charmes du jour, jamais vos grâces n'ont Tant souffert d'un rebelle essayant sa défense: Mais, comme les soleils m'ont tiré de l'enfance, Je remonte à la source où cesse même un nom.
En vain toute la nymphe énorme et continue Empêche de bras purs mes membres harassés; Je romprai lentement mille liens glacés Et les barbes d'argent de sa puissance nue.
Ce bruit secret des eaux, ce fleuve étrangement Place mes jours dorés sous un bandeau de soie; Rien plus aveuglément n'use l'antique joie Qu'un bruit de fuite égale et de nul changement.
Sous les ponts annelés, l'eau profonde me porte, Voûtes pleines de vent, de murmure et de nuit, Ils courent sur un front qu'ils écrasent d'ennui, Mais dont l'os orgueilleux est plus dur que leur porte.
Leur nuit passe longtemps. L'âme baisse sous eux Ses sensibles soleils et ses promptes paupières, Quand, par le mouvement qui me revêt de pierres, Je m'enfonce au mépris de tant d'azur oiseux.
El remero
Entregado a un gran río, mi bogar incesante Me arranca con dolor del entorno risueño: Alma de manos graves, colmadas por los remos, Debe el cielo ceder al son de lentas láminas.
Duro, lejos los ojos de las gracias que bato, Dejando en torno a mí crecer círculos de onda, Quiero con largos golpes romper el mundo ilustre De follaje y de fuego que celebro en voz baja.
Arboles que atravieso, ancho reflejo ingenuo, Agua pintada de hojas, y paz de lo cumplido, Barca mía, desgárralos, somételos a un pliegue Que del sosiego corra a abolir la memoria.
Nunca, encantos del día, nunca sufristeis tanto Por causa de un rebelde que intenta defenderse: Pero, como los soles me quitaron la infancia, Navego hacia la fuente donde hasta un nombre cesa.
Toda la ninfa, en vano, persistente y enorme, Prende con brazos puros mis miembros fatigados; Romperé poco apoco mil hzadas de hielo Y las barbas de plata de su fuerza desnuda.
Este ruido secreto del agua, extrañamente, Pone a mis días de oro una venda de seda; Nadie más ciegamente mella el antiguo gozo Que un ruido de huida igual y de nula mudanza.
Bajo puentes de anillo, me lleva el agua honda, Bóvedas llenas de aire, de murmullo y de noche, Corren sobre una frente que fulminan de tedio, Mas cuyo hueso altivo dura más que su puerta.
Es muy larga su noche. Bajo ellos cierra el alma Sus soles sensitivos y sus rápidos párpados, Cuando, a través del gesto que me viste de piedras, Me sumerjo a pesar de tanto azul ocioso.
Versión de Andrés Sánchez RobaynaLibellés : Paul Valéry |
posted by Alfil @ 5:55 PM |
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