Charles Baudelaire -A une Mendiante rousse- |
dimanche, avril 23, 2006 |
A une Mendiante rousse Charles Baudelaire (1821-1867)
Blanche fille aux cheveux roux, Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté,
Pour moi, poète chétif, Ton jeune corps maladif, Plein de taches de rousseur, A sa douceur.
Tu portes plus galamment Qu'une reine de roman Ses cothurnes de velours Tes sabots lourds.
Au lieu d'un haillon trop court, Qu'un superbe habit de cour Traîne à plis bruyants et longs Sur tes talons;
En place de bas troués Que pour les yeux des roués Sur ta jambe un poignard d'or Reluise encor;
Que des noeuds mal attachés Dévoilent pour nos péchés Tes deux beaux seins, radieux Comme des yeux;
Que pour te déshabiller Tes bras se fassent prier Et chassent à coups mutins Les doigts lutins,
Perles de la plus belle eau, Sonnets de maître Belleau Par tes galants mis aux fers Sans cesse offerts,
Valetaille de rimeurs Te dédiant leurs primeurs Et contemplant ton soulier Sous l'escalier,
Maint page épris du hasard, Maint seigneur et maint Ronsard Epieraient pour le déduit Ton frais réduit!
Tu compterais dans tes lits Plus de baisers que de lis Et rangerais sous tes lois Plus d'un Valois!
- Cependant tu vas gueusant Quelque vieux débris gisant Au seuil de quelque Véfour De carrefour;
Tu vas lorgnant en dessous Des bijoux de vingt-neuf sous Dont je ne puis, oh! Pardon! Te faire don.
Va donc, sans autre ornement, Parfum, perles, diamant, Que ta maigre nudité, O ma beauté!
A una mendiga pelirroja
Pelirroja y blanca niña, Cuya ropa entre los rotos Permite ver la pobreza Y la hermosura;
Para mí, triste poeta Tu joven cuerpo enfermizo, Salpicado por las pecas, Tiene encanto;
Llevas con más galanura Que una novelesca reina Sus riquísimos coturnos, Bastos zuecos;
En vez de escasos harapos, Que un lindo traje de gala Arrastre sus largos pliegues Sobre tu pie;
En lugar de rotas medias, Imán de sucias miradas, Que un puñal de oro reluzca En tu pierna;
Que ojales mal abrochados Muestren a nuestros pecados, Tus bellos, radiantes senos, Cual dos ojos;
Y que para desnudarte Tus brazos se hagan rogar, Hábilmente rechazando Dedos rápidos;
Perlas de bellos reflejos, Versos del maestro Belleau Por tus rendidos galanes Dedicados,
Morralla de rimadores, Sus primores ofreciéndote, Contemplando tu chapín En la escalera,
Mucho fascinado paje, Mucho señor y Ronsard, Espiarían divertidos Tu frío cuarto.
En tu lecho contarías Muchos más besos que lises Y tu ley acataría ¡Más de un Valois!
-Sin embargo, pordioseas Y remueves la basura En el dintel de un Véfour De encrucijada;
Vas por el suelo buscando Alhajas de perra chica Que no podría, ¡oh! ¡perdona! Ofrecerte.
Ve, pues, sin otro ornamento, Perfume, brillante, perlas, Que tu magra desnudez, ¡Oh bella mía!Libellés : Charles Baudelaire |
posted by Alfil @ 9:41 AM |
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